INTERVIEW AVEC BLACK CHRIST (BLESSED
IN SIN)
Février 2019
Blessed In Sin ! Ce nom résonne dans les entrailles des enfers depuis plus de 25 ans. Chargé de souffre et de légendes, ce groupe mythique fait partie de ceux qui ont donné ses lettres de noblesse au Black Metal français notamment au travers du Concilium toulonnais dont ils sont un des fers de lance. Un voyage entre nostalgie pour une époque morte, nouveaux projets et authenticité à tous les étages. Une immense fierté pour le Scribe que d'avoir pu obtenir cet entretien rare et exclusif avec Black Christ et Overlord Nasty Metatheos, deux frères unis pour l'éternité afin de répandre ténèbres et stupeur. Une interview retrospective de toute la carrière du groupe ! ENJOY !
Le Scribe
Merci à vous Black Christ et OLNM d'avoir
accepté cette interview dans laquelle nous allons revenir sur votre groupe culte,
Blessed in Sin. Peux tu nous rappeler le contexte de la création du groupe en
1993 à Toulon ?
Black Christ: la scène Thrash/Death était à bout
de souffle, et il n'y avait pas de scène Black Metal à Toulon. Avec mon frère
nous venions de nous séparer de Bloody Ritual et avions eu l'envie de créer
Blessed in Sin; nous partions à zéro, sans musicien ni contact.
Nous avons rapidement trouvé un
second chanteur, un lead guitariste ainsi qu'un batteur, et quelques mois après
la naissance du groupe les premières répétitions eurent lieu (en février 1994).
Nous avons commencé avec des reprises et ma 1ère compo ("Beyond the Black
Lake"). Le second chanteur a été remplacé, puis un clavier nous a rejoint,
et avec ce line-up presque complet, Blessed In Sin prenait enfin vraiment vie.
Pendant très longtemps nous n'avons pas eu de véritable bassiste (sans quoi
nous aurions été 7 dans le groupe), toutefois Lenrauth nous a aidé à de
multiples reprises à la basse dès 1994 (la dernière fois remonte à 2013). Sinon
le fait d'avoir deux chanteurs était vraiment atypique, mais cette
particularité n'aura duré qu'une année.
Quelles étaient vos influences à
l'époque ?
O.L.N.M : Comme aujourd'hui
diverses et variées, de Manowar à Mayhem en passant bien sûr par Rotting
Christ.
B.C.: Je voulais m'inspirer des premiers
albums de Rotting Christ, Acheron, Deicide et Impaled Nazarene... ce sont ces
groupes qui m'ont poussé à créer Blessed in Sin. Mais c'était surtout
théorique, car au final c'est le côté grec qui est ressorti, avec des touches
Heavy/Thrash.
Vous sortez votre
première démo en 94, Unholy rehearsal. Vous étiez alors des pionniers du BM en
France, avec Gorgon (vive le sud!). Quel regard portes tu rétrospectivement sur
cette période ?
B.C.: il y a eu une première
"vague" de groupes avant nous, principalement sudiste d'ailleurs
(Gorgon, Mutiilation, Stregoica, Maleficum Orgia, Osculum Infame etc.).
Cette période avait indéniablement
quelque chose de stimulant, nos premiers pas dans l'underground - bien que nous
avions déjà une petite expérience avec Bloody Ritual - mais désormais avec
Blessed in Sin c'était principalement moi qui m'occupais de la correspondance,
et surtout des compositions.
Cela se traduisait par l'échange de
lettres à travers de nombreux pays, faire nos premiers flyers photocopiés, puis
par la suite sortir notre 1ère demo, copier d'innombrables cassettes, avoir nos
premiers articles et interviews dans des zines underground, apparaitre sur des
compilations cassettes; la correspondance était variée, entre les
zines/individus/labels/distros, groupes français et étrangers avec lesquels on
faisait des échanges (Anaon, Zephyrous, Osculum Infame, Varathron, Profane
Creation, Lord, Desaster, Primigenium, Countess etc.). Par le biais de tout
cela nous découvrions d'autres groupes, zines, distros, et ainsi de suite,
c'était exponentiel.
Quelques concerts dans le sud furent
l'occasion de rencontres, notamment à celui de Samael à Marseille en décembre
1994 (le même mois où justement nous sortions notre 1ère cassette: "Unholy
Reh.") avec les membres d'In Articulo Mortis; ce qui nous a permis de jouer
en leur compagnie au 1er festival Drakkar en janvier 1995, avec Supuration en
tête d'affiche.
C'était un milieu beaucoup plus
restreint, presque confidentiel... Une scène à part, ignorée ou
moquée/condamnée par la presse Metal... et cela ne pouvait que nous convenir
encore plus...
Une grande partie des demos et albums
marquants ou véritablement cultes ont été enregistrés et/ou sont sortis entre
1993 et 1995 (Mayhem, Rotting Christ, Denial of God, Beherit, Emperor, Veles,
Agatus, Graveland, Fullmoon, Acheron, Sigh, Mortuary Drape, Grand Belial's Key,
Abigor, les Black Legions, Mayhemic Truth, Deinonychus etc.): si aujourd'hui
c'est une évidence, à l'époque il n'y avait bien entendu aucun recul, on ne
pouvait pas imaginer l'ampleur que ça prendrait.
En dehors de toutes ces références
(dont des groupes "secondaires" qui ont eur leur importance), il y a
beaucoup de groupes inconnus, oubliés, 1 mine d'or dans laquelle je continue
encore aujourd'hui de faire des découvertes.
Je pense que les choses se faisaient
plus spontanément, et surtout avec beaucoup plus de libertés. On peut reprocher
le fait que beaucoup voulaient choquer, apparaitre
plus "evil"/extrême qu'ils ne l'étaient réellement, mais depuis c'est
souvent l'inverse, notamment à cause d'une censure grandissante.
O.L.N.M. : Une période vraiment
particulière; le Black Metal n'était pas encore devenu une niche commerciale
intéressante pour les labels ou les mags. A mon avis c'était aussi tout à fait
paradoxal; il y avait des gens très sincères dans leur démarche, mais aussi pas
mal de petits bourgeois qui jouaient à se faire peur, qui rêvaient d'une petite
gloire facile, d'ailleurs beaucoup s'en sont allés rapidement, ou se sont
confondus en explications, excuses dès les premiers ennuis judiciaires
s'abattant sur la scène; certains n'hésitant pas même à condamner toute une
partie de la scène; c'était énorme comme à cette époque tous les grands
satanistes anti morale anti ceci ou anti cela sont devenus de grands
moralisateurs et d'encore plus grandes balances ou indics auprès des rg, la
plupart n'ayant d'ailleurs aucune info réelle à balancer; paradoxalement encore
une fois c'est à cette époque (après l'exposition médiatique) qu' il
fallait - pour ces gens -tenter de
décrocher un contrat sur un label et éviter des ennuis judiciaires qui
n'auraient pas été de bonne augure pour les affaires de papa/maman; bref
l'époque où le satanisme (dans son sens le + large) est devenu non le
corrupteur de la jeunesse mais l'étendard de la bien pensance généralisée
ahaha; Pour en revenir à nous, nous n'avions pas du tout le sentiment d'être
des pionners, nous avions quitté le groupe de Thrash/Death que j'avais créé en
1990 suite à des différents profonds avec le reste du groupe, le Death Metal ne
nous convenait plus du tout, et nous avions trouvé dans le Black Metal un
univers qui était plus conforme à nos attentes et à nos aspirations; nous avons
donc galéré pour essayer de trouver des musiciens et on s'est mis à répéter,
sans arrières pensées, sans plan particulier, on faisait juste ce qu'on avait
envie de faire, sans se soucier du reste.
A l'époque la scène Norvégienne
battait son plein. Vous avez même sorti votre propre tribute à Euronymous en
1995. Etait-ce une prise de position contre Vikernes ? Quel était votre
positionnement quant à la Norvège ? Quels groupes vous ont le plus touché ?
O.L.N.M. : pour moi Euronymous
reste l'incarnation même du Black Metal et l'album “De Mysteriis Dom Sathanas”
reste la pierre angulaire du Black Metal ; ce tribute était vraiment un hommage
à celui qui a ré inventé le Black Metal ; qui lui a donné son âme, qui lui a
donné une légende, son aura;
musicalement j'ai toujours été très fan de la scène grecque et nordique
aussi quoi qu'il en soit, norvégienne ou pas d'ailleurs, je crois que Black
Christ aussi, et il me semble que cela s'entend et se voit. Les groupes qui
m'ont vraiment plu ce sont tous les groupes cultes comme Darkthrone, Emperor,
Rotting Christ, Varathron, Thou art lord, Satyricon, Marduk, Barathrum bien
sûr, Evol etc., j'ai aussi beaucoup aimé le projet Satanicum Tenebrae par
exemple.
B.C. : la scène Norvégienne a fortement
inspiré une grande partie de la scène mondiale, en plus d'une musique
extraordinaire et novatrice, beaucoup d'entre eux "passaient à
l'acte". Il n'était donc plus question de musique uniquement, mais de
véritables convictions. Ca impressionnait le jeune de 16 ans que j'étais en
1993; et bien entendu ça tranchait véritablement avec tout ce que j'avais connu
jusque là avec les scènes Thrash et Death Metal, je trouvais enfin dans le
Black Metal un milieu dans lequel je me reconnaissais idéologiquement.
Ceux qui m'ont le plus marqué sont
évidemment Mayhem et Burzum, ainsi qu'Emperor, Immortal, Enslaved, Darkthrone,
Isengard, Carpathian Forest, Gorgoroth, Satyricon... Chacun avait son style.
« Odes Obscures » sorti en 96 en
cassette était à cheval entre la démo et l'album. Votre Black Metal y reste
extrêmement cru et noir, mais les claviers, très présents, amènent une
atmosphère toute particulière. Peux tu revenir pour nous sur cette démo ?
O.L.N.M. : cette démo répète aurait
du être enregistrée en studio et faire un album; malheureusement; l'histoire en
a décidé autrement; les musiciens ont disparu dans la nature, l'enregistrement
studio n'a pas pu être fait et c'est devenu une démo; je crois que c'est un des
rares regrets que j'ai eu avec Blessed.
B.C. : cette période a débuté seulement un
an après nos premières répétitions, avec notre premier important changement de
line-up, qui nous avait conduit à aller répéter à Marseille. De nos 4 anciens
musiciens ne restait que le clavier, nous avions désormais un nouveau batteur
ainsi qu'un nouveau guitariste soliste (qui m'avait remplacé dans Bloody Ritual
fin 1993). Ce dernier a fait une unique compo pour nous, qui ouvre "Odes Obscures".
Excepté le titre "Purify by
fire" qu'on retrouve sur nos précédentes demos, tous les autres morceaux
étaient nouveaux, plus aboutis et complexes, avec des claviers beaucoup plus
présents, qui prenaient enfin toutes leurs dimensions.
En peu de temps on était allés
beaucoup plus loin, tout en ayant une évolution assez logique, conséquence
directe de cette nouvelle formation; je ne peux imaginer ce qu'on aurait pu
faire si ce line-up avait duré...
"Odes Obscures" aurait
indéniablement eu un tout autre impact si ça avait été un enregistrement
studio, sorti par Drakkar en 1995/1996. Heureusement nous avions quelques
enregistrements répét de ces morceaux car il aurait été impensable de laisser
ces titres dans l'oubli; mais au final ce fut une autre demo de répétitions,
souffrant également d'une distribution limitée et chaotique suite à des
problèmes extra musicaux.
Malgré cela, c'est toujours à mon
avis notre réalisation la plus intense, qui correspond à notre meilleure
période.
En 98 vous sortez une compilation
regroupant le tribute a Euronymous et Odes Obscures. Quelle en était la raison
?
B.C.: il n'y avait plus rien de disponible
de Blessed, et on pouvait penser que le groupe n'existait plus. Comme nous
n'avions rien de nouveau à proposer (nous étions en phase répétition pour le
1er album), et comme j'étais toujours "fier" de nos vieux titres,
sortir une cassette qui regrouperait l'intégralité de nos morceaux m'avait paru
opportun. Ca célébrait aussi nos 5 ans d'existence. Pour ne pas défavoriser
ceux qui avaient nos demos originales (sorties relativement peu de temps
avant), je n'avais ajouté aucun bonus et j'avais opté pour 1 pochette très
simple, épurée. Alors que beaucoup de groupes arrêtaient de distribuer leurs
demos, je voulais que les notres restent
disponibles, à un prix très abordable; j'ai d'ailleurs continué à distribuer
cette cassette pendant de très longues années.
Vous étiez proches de Seigneur
Voland et Kristallnacht, peux tu évoquer pour nous ces groupes et vos relations
?
O.L.N.M.: les membres fondateurs
de ces 2 groupes sont des amis proches depuis de très longues années, avec
Xaphan nous sommes amis depuis notre adolescence à peu près, quant à LF cela
remonte au tout début de notre adolescence, au collège; et depuis notre amitié
est toujours là, malgré quelques divergences ahaha.
B.C.: nous nous sommes donc connus avant de
créer nos groupes respectifs et nous sommes toujours proches aujourd'hui. Nous
avons créé ensemble avec Lenrauth le groupe qui deviendrait Kristallnacht; par
la suite j'ai été session dans ce projet à diverses reprises (enregistrements
et concerts). Dans les années 2000 Blessed In Sin a partagé l'affiche avec ces
2 groupes. Je suppose que personne n'ignore que Seigneur Voland s'est reformé
récemment pour donner des concerts (Finlande, Allemagne, Belgique, Ukraine,
Japon...).
Votre premier LP, Melancholia
sort en l'an de CRASSE 2000. Il contient un Black Metal à la fois sophistiqué
et cru comme l'enfer. Comment avez vous réussi cette fusion ? Est-ce pour toi
symbolique d'une certaine scène française que vous avez contribué à créer ? Que
penses tu de ce disque aujourd'hui ?
O.L.N.M. : ce disque est comme tu le dis un exemple
de ce que l'on peut faire de très cru, très dépouillé et à la fois plus
complexe qu'il n'y parait; j'aime toujours cet album comme tout ce que nous
avons pu sortir jusqu'à ce jour, chacune de nos productions est à la fois
unique et en même temps complètement identifiable comme étant une oeuvre de
Blessed In Sin. J'ignore si nous avons avons contribué à créer quoi que ce
soit; car comme je te le disais un peu plus tôt nous avons toujours joué pour
nous, sans chercher à trop réfléchir, planifier quoi que ce soit.
B.C. : si fusion il y a, ce n'était pas
conscient. Odes Obscures était notre réalisation la plus technique/élaborée, et
si l'album qui a suivi -Melancholia - est beaucoup plus dépouillé, c'est
principalement du au changement de line-up, réduit à sa forme la plus simple,
car désormais il n'y avait plus qu'un batteur pour nous accompagner. Ce
dernier, déjà limité par ses capacités techniques, était aussi véritablement
stressé par l'enregistrement (pour lui comme pour moi il s'agissait de notre
1ère expérience studio); ce qui a donné des parties vraiment médiocres voire
ratées par moments.
Si on avait pu élaborer les compos
pour Melancholia en répét avec le line-up d'Odes Obscures (ou même avec notre
1er line-up), pour ensuite l'enregistrer en studio, ces morceaux auraient
véritablement pris une toute autre ampleur.
Mais malgré ces nombreuses
imperfections j'aime toujours beaucoup Melancholia.
Certains groupes Français des années
90 n'ont pas dépassé le stade des demos (Seyiren, Machiavel), d'autres ont mis
très longtemps à sortir un album (Puritas Virginum, In Articulo Mortis,
Maleficum Orgia, Bekhira, Mircalla/Sa Meute, Nehemah).
Le 1er album de Black Metal Français
aurait du voir le jour en 1993, avec
Mutiilation "Evil: -The Gestalt of Abomination", mais
finalement les premiers Cds de groupes Français sont sortis assez tardivement, dans
le milieu des années 90 avec Gorgon, Mutiilation, Blut Aus Nord, les splits de
Vlad Tepes. C'était surtout du Black "traditionnel", puis sont sortis
les albums d'Osculum Infame, Lord (on peut aussi citer le MCD de Godkiller en
1996), et l'album et le style de Blessed se rapprochent un peu plus de ces
groupes, par le côté mélodique/claviers.
Vous ne cherchiez pas à faire la
course à la vélocité ou à la brutalité, mais plutôt à installer une certaine
atmosphère. Quelles étaient vos velléités alors ?
O.L.N.M. : en fait je pense que nous
n'avons jamais cherché de manière consciente à faire telle ou telle chose,
sonner comme ceci ou cela; sans doute effectivemment sommes nous plus enclin à
créer certaines atmosphères plutôt que de proposer des chansons brutales ou
rapides...
B.C. : c'est l'essence même du Black, de
créer une certaine atmosphère. Les groupes qui cherchent à faire une musique
principalement brutale ou technique n'ont aucun intérêt pour moi, au final rien
ne ressort de leur musique, si ce n'est l'ennui.
En 2001 vous participez au split
avec Seigneur Voland et Kristallnacht. Peux tu y revenir ?
B.C. : initialement on prévoyait un split
EP avec Kristallnacht, et l'idée a évolué en triple split avec l'ajout de
Seigneur Voland, sous un autre format. Notre unique compo sur ce split est plus
"rentre dedans" que nos morceaux habituels.
Ce split a très bien marché, nous
avons du le represser, et sorti par la suite une nouvelle édition comprenant
"Of elitism and war" de Kristallnacht en plus. Cette réalisation
marquait la naissance du Concilium.
Ce fut notre période la plus
prolifique, nous avions sorti notre 1er album l'année précédente, et en 2001
sortaient ce split ainsi que notre 2ème album. Nous avions aussi enregistré la
plupart des titres pour "Honour the anus of mary" en 2001.
O.L.N.M. : bon souvenir que ce split
qui regroupe les 3 groupes Toulonnais qui ont marqué la scène Black Metal, je
pense que c'etait assez symbolique et important que nous soyons réunis sur un
même disque.
Après le très beau et original
Melancholia vous produisez un deuxième album, Par le sang du christ (Opus
Luciferi) en 2001 aux sonorités profondes et spirituelles. Etiez vous guidés
par une spiritualité particulière ? Alors que beaucoup se sont focalisé sur des
aspects extra musicaux vous concernant, vous sortez un 2ème album absolument
magnifique, riche et varié. A l'écoute de ce dernier, on peut presque penser
que vous ne subissiez pas l'influence des autres groupes. Comment avez vous
procédé pour cet album et quel est ton regard sur celui-ci aujourd'hui ?
O.L.N.M. : je ne pense pas que nous
ne subissions pas l'influence d'autres groupes, ceci dit en tout cas il semble
que pour beaucoup de gens nous ayons une sonorité, une identité tout à fait
marquée ce qui est une bonne chose; concernant la spiritualité elle a toujours
été présente dans nos textes et notre musique et ce depuis le début, et il est
vrai qu'aujourd'hui cela peut sembler assez étrange ou décalé puisqu'il y a un
retour à un Black Metal + politisé et que les origines du Black Metal sont
aujourd'hui complétement ensevelies ou presque sous les assauts de nouveaux
arrivants et d'anciens faisant un come-back à la recherche de moyens de
provocations pour se faire un nom et avoir leur quart d'heure de gloire... Nous
composons chez nous sans penser à ce qui se passe ou se fait dans le petit
monde Black Metal, ce qui est le cas depuis notre premier morceau, nous
n'agissons pas, nous ne créons pas pour suivre le mouvement, la mode Black
Metal du moment, nous sommes complètement déconnectés de ce genre de chose, qui
n'ont aucun intérêt pour nous...
B.C. : comparé au 1er album où nous
n'étions que 3, pour "Par le sang..." nous avions enfin un bassiste,
et surtout avions retrouvé un claviériste.
Nous avions toujours le batteur de
Melancholia jusqu'à ce qu'on se décide d'enregistrer "Par le
sang...", mais comme ce dernier nous a quittés au dernier moment, Lord
Diabolus (qui a joué sur "Odes Obscures") nous a aidés pour le
studio, après seulement une poignée de répét.
Avec un bon batteur et du clavier, ce
2ème album est plus riche, maitrisé, et diversifié que "Melancholia".
Ca nous a plutôt rapproché de la période "Odes Obscures", avec
notamment le retour de titres claviers/voix. Je suis donc toujours pleinement
satisfait de cet album, il n'y a rien de particulier que je changerais dessus
si on devait le refaire.
Tout ce qui est contemporain ne
m'inspire que rarement, en tout cas consciemment, mes influences majeures sont
restées les mêmes depuis nos débuts. Même si les années passent, que le niveau
technique ou les méthodes d'enregistrement peuvent évoluer, j'aime garder une
certaine cohérence dans le style, peu importe les tendances du moment.
En 2004 vous revenez avec le
très provocateur Honor the anus of Mary (EP) et son intro hallucinante. Cet EP
est plus brut et cru que l'album précédent. Etait ce pour vous une façon de
marquer un retour aux sources du BM ? Une façon de dire : on est encore là ?
O.L.N.M. : Honour est un lp
particulier, enregistré “ à l'ancienne”, ce qui lui donne son aspect vraiment
brut et cru, qui au final colle assez bien avec les chansons, il y a une
cohérence entre la musique, la cover et l'enregistrement, tout est cru, brutal,
sans fioriture. On est loin du Black Metal théatral de certains qui cherchent
une certaine légitimité en produisant des albums calibrés... peut être
qu'inconsciemment nous avions assez d'un Black Metal de + en + mainstream,
plat, lisse; et de groupes se complaisant dans une attitude de provocation très
boboïsante, limite “bon enfant”, qui faisait attention à ne pas froisser
certaines susceptibilités tout en cherchant une légitimité à travers une
approche beaucoup trop pro, technique, -musicalement j'entends- du Black Metal,
tu sais le genre : “nous sommes de vrais musiciens, nous jouons vraiment bien
de nos instruments nous allons dans un vrai studio avec de vrais ingé sons”;
toute cette merde pour essayer d'exister légitimement au sein du “Metal” et
plus généralement de la musique, cet espèce de complexe post 90' ou les types
qui faisaient du Black ont commencé à se justifier en tant que musiciens après
que la presse Metal et au delà les ai traités d'amateurs incapables d'aligner 3
notes, je crois que malheureusement une bonne partie de cette scène continue
d'une manière ou d'une autre de tenter de se justifier de la sorte; ce qui est
parfaitement pathétique, après les excuses du genre nous sommes satanistes,
mais de gentils satanistes respectueux des lois et des livres saints il y a eu
le nous faisons du Black Metal mais nous sommes de vrais musiciens allant dans
de vrais studios pour faire de la vraie musique bien calibrée.
B.C. : en 1999/2000 Soulseller nous avait
proposé de sortir un 45 tours. Ca a pris des années de retard, on a ajouté
d'autres titres à ce projet (surtout des reprises), entre temps le label a
changé, et comme c'était notre première sortie vinyle, on a voulu présenter
quelque chose de différent, qui trancherait avec nos releases habituelles,
quelque chose de plus old school, moins travaillé.
Comment viviez vous
l'évolution de la scène BM en ces années 2000 ? Beaucoup ont alors pensé que
c'était mort, fini, enterré. Vous êtes la preuve, avec quelques uns, que ce
n'était pas le cas. Qu'en penses tu ?
B.C. : à la fin des années 90
et débuts des années 2000, beaucoup de nouveaux groupes sont apparus, pendant
que nombre de vieilles formations disparaissaient ou changeaient. La scène
était en pleine métamorphose.
Les mag et labels bien
pensant qui autrefois dénigraient le B.M., avaient subitement revu leur
position. Se conformant aux règles de ces derniers, beaucoup de groupes y ont
aussi trouvé leur compte; la reconnaissance et le succès passant par là; avec
le temps certains ont connu une évolution comparable à une partie de la scène
Death Metal (devenant plus professionnel, changeant de son, logo, attitude,
adoptant un style différent/plus soft).
Ce fut aussi sûrement le
début du politiquement correct dans ce milieu.
Nous avons simplement poursuivi notre chemin, nous n'attendions rien et
n'avions rien à attendre de ces opportunistes.
En 2013 vous revenez avec le
split avec les Aixois d'ORDO TEMPLI AETERNA LUCIS (en fait l'aixois, puisqu'il
s'agit d'un one man band mené par Hunferd). Vous y jouez un BM véloce et
puissant, majestueux. Comment s'est fait le contact avec OTAL ? Et que penses
tu du résultat ?
B.C. : nous connaissions Hunferd depuis des
années, et l'idée de ce split remontait à 2002... Nous avions planifié de
l'enregistrer à 3 (Hunferd, mon frère et moi),
sans musicien session (c'est pourquoi il n'y a qu'une boite à rythmes.).
Toutefois au dernier moment j'ai ajouté 1 intro et 1 outro clavier de Belial,
vieux titres antérieurs à son arrivée dans Blessed. Même si rien n'est jamais
parfait, j'apprécie toujours autant les morceaux de ce split. Au fil des années nous avons eu quelques propositions de
split, mais jusqu'à présent les seuls que nous avons fait l'ont été avec des
personnes que nous connaissons personnellement.
O.L.N.M. : Hunferd est un ami de
longue date; il nous a semblé opportun de célebrer cette amitié par la
réalisation de ce split. Le résultat me plait; ça ne sonne pas contemporain,
plat, lissé, pro. L'esprit des 2 groupes est parfaitement conservé, normal
puisque nous avons à peu près tout fait seul, et que nous ne subissons aucune
pression ou contrainte pour nos réalisations.
En 2014 tu t'occupes de la
réédition de Melancholia et Par le sang du christ regroupés sur deux cd sous le
titre Celebrating The Whore. Etait ce pour montrer la continuité de l'histoire
entre les deux lp ou rendre disponible ces titres à nouveau ?
O.L.N.M. : il s'agissait plutôt de
les rendre à nouveau et facilement disponible, et puis l'objet en lui même est
plutôt bien fait, c'est un bel objet, avec 2 livrets 12 pages; pas cher. Ca
permet à ceux qui n'étaient pas là quand ces albums sont sortis de pouvoir se
les procurer.
B.C. : là aussi il s'agissait d'un projet
assez ancien, puisque c'est Nihil Voces qui nous avait proposé en 2004 de
rééditer nos albums. Finalement, 10 ans plus tard, avec "Celebrating the
Whore" et les rééditions de nos demos (en 2012), quiconque intéressé par
B.I.S. pouvait avoir l'intégralité de nos anciennes compos avec 1 double CD et
2 cassettes.
Votre dernière sortie en date
est une compilation de répétitions du groupe sortie en 2017 sous le titre
Materia Prima. Peux tu nous en dire un peu plus ?
B.C.: il ne s'agit pas d'une compilation
de répétitions, mais d'un enregistrement studio inachevé de 2005-2006 qui
aurait du être notre 3ème album. Cependant à l'époque nous avons décidé de
stopper cet enregistrement, et de tout refaire ailleurs; ça a pris beaucoup
plus de temps que prévu, d'où le délai de 12 ans entre notre 2ème et 3ème
album...
Pendant toutes ces années les
morceaux de "Materia Prima" sont restés de côté: avec la sortie du
3ème album je ne pensais jamais publier ces titres.
Mais finalement en les réécoutant,
j'ai jugé que ça méritait une sortie officielle, (en format cassette pour
éviter d'avoir 2 fois les mêmes titres en CD; de plus avec les bonus la durée
est simplement trop longue pour un CD).
Hormis le fait qu'il n'y ait pas de
véritable mixage, le côté inachevé est anecdotique, la plupart des parties ont
été enregistrées.
Il est digne d'intérêt,
au moins pour les plus fans du groupe; le son se rapproche plutôt de nos
précédents albums (ces 3 enregistrements ont été fait avec la même personne).
Vous existez toujours, après 25
ans ! C'est rare pour un groupe français de votre génération. Comment expliques
tu cette longévité ?
O.L.N.M. : c'est assez simple, en
fait Blessed est le fruit de mon frère et de moi même; alors c'est plus simple
de durer quand on est frères, même si nous sommes loin d'être toujours d'accord
sur tout et que nos désaccords sont fréquents; et surtout Blessed n'est pas un
palliatif à un narcissisme maladif... Beaucoup font de la musique pour faire
vivre leur narcissisme qui lorsqu'il n'est pas, peu, ou plus comblé devient un
problème à éliminer; il n'y a de plus, pas de guerre d'égo entre les membres,
ce qui était souvent le cas dans de nombreuses formations; il n'y a donc pas de
guerre interne entre qui sera la star ou pas, qui est responsable du succès ou
de l'échec... C'est beaucoup plus simple de durer ainsi; imagine que nombre de
types multiplient les projets pour devenir riche ou célèbre en suivant toujours
le vent de la “mode”, pour combler cet immense vide qui les habite; nous on
fait Blessed par envie par passion, la recette est aussi simple que ça.
B.C. : lorsque nous avons commencé, ce
n'était pas pour faire carrière, être riche et célèbre (pour le coup on peut
dire que nous n'avons pas été déçu). A cette époque ça n'aurait eu d'ailleurs
aucun sens, percer avec le Black Metal (surtout en venant de France) aurait été
impensable. Comme la plupart des groupes, nous avons rencontré beaucoup de
difficultés au fil des années - sûrement plus que d'autres - mais ce qui aurait
pu nous stopper nous a au contraire motivé à continuer. La passion, la
persévérance, peut-être un certain masochisme...j'ai passé, et continue de
passer un temps incroyable sur le groupe, pour pas grand chose au final, si ce
n'est pas ma propre satisfaction.
A part Blut Aus Nord je ne crois pas
qu'il y ait d'autre groupe français ayant une telle longévité que Blessed in
Sin.
Ton regard d' expert sur le Black
Metal depuis les années 90 jusqu'aujourdhui. Comment expliques tu que ce genre,
à l'époque promis à une disparition rapide par certains, soit toujours aussi
vivace, avec un public toujours nombreux ?
O.L.N.M. : je ne sais pas si le
public est nombreux, et s'il l'a jamais été en fait; c'est en fait une minorité
qui peuple le Black Metal, un de ces types de minorités qui a toujours existé
et qui existera encore longtemps, et qui se transforme lentement, et qui un
jour n'existera plus sous sa forme actuelle mais qui existera sous une forme
mutante; différente; le Black Metal est un peu le Satan du poème de Baudelaire
pour ceux qui en écoutent : le Bâton des exilés, lampe des inventeurs,
Confesseur des pendus et des conspirateurs, le Père adoptif de ceux qu'en sa
noire colère Du paradis terrestre a chassé Dieu le Père ...
B.C. : je dirais que fin années
80/débuts 90, le B.M. était principalement underground (son
"amateur", petits labels, correspondance, zines etc.). C'était un
univers difficile d'accès, s'adressant à un public limité de
connaisseurs/passionnés, beaucoup de gens dans le satanisme/occultisme, ou
simplement anti religieux.
Après les vagues Thrash
et Death, la "2ème vague" Black Metal s'est imposée, surtout incarnée
par les Norvégiens, mais il y a eu des groupes importants dans une multitude
d'autres pays (Samael, Mortuary Drape, Acheron, Necromantia, Blasphemy, Sigh
etc.). Les ambiances étaient vraiment particulières, le son à l'opposé de la
norme dans le Death Metal (il suffit de comparer par exemple Drawing dawn the
moon, Crossing the fiery path, Under a funeral Moon avec "Legion" de
Deicide, Morbid Angel "Covenant", Death "Human" etc.).
Alors qu'aucun autre
style extrême majeur n'est apparu, le Black Metal est devenu assez rapidement
très varié, attirant un public plus large, et dès le milieu des années 90, il a
été exposé à un nombre beaucoup plus important avec la médiatisation de
certains actes et sa "commercialisation", le nombre de groupes et de
labels a explosé; petit à petit il n'y avait plus vraiment à chercher dans des
zines et distros obscurs, tout était à portée de mains.
Depuis, il y a eu
l'apparition d'Internet, ce qui a exposé le B.M. comme jamais auparavant. De
nos jours, presque tout se passe sur le net, la promo, la vente, les interviews...
n'importe qui peut y avoir accès. Même s'il n'y a pas des dizaines de millions
de personnes qui écoutent du Black Metal dans le monde, il y en a
incomparablement plus qu'en 1992 par exemple.
J'ai commencé avec du
Hard-Rock, puis du Heavy, Thrash et Death Metal, et si j'adore toujours autant
les groupes que j'ai écoutés dans ma jeunesse, aucun n'a d'atmosphère
comparable à celles qu'on peut retrouver dans le Black Metal, et je crois que
c'est en partie ça qui continue d'attirer du public, ces ambiances singulières,
ainsi que l'originalité, un univers varié (sans oublier le côté
"sulfureux").
Avez vous des projets avec
Blessed In Sin ? Du nouveau matériel peut être ?
B.C. : "il faudra encore patienter pour du
matériel nouveau, probablement une 4ème démo, avant un hypothétique 4ème album."
Début 2020 devraient enfin sortir nos
3 albums en format vinyle (chez Those Opposed rec. pour les deux premiers, et
le 3ème chez Obscure Abhorrence). Nous sommes justement en train de vérifier le
tout une dernière fois, et apporter les corrections/modifications finales.
Sinon ces dernières années j'ai
particulièrement essayé de mettre la main sur un maximum d'archives de Blessed
in Sin, qu'il s'agisse de vieux enregistrements de répétitions, de photos,
videos, interviews etc.; j'en avais déjà beaucoup de côté, désormais j'en ai
bien plus et j'espère en obtenir encore d'avantage. Evidemment je ne compte pas
tout sortir, mais de ces recherches découlera déjà une split cassette avec In
Articulo Mortis (R.I.P.), contenant donc des vieilles répét inédites. Dans le
milieu des années 90 nous parlions de faire un split ensemble, ça sera bientôt
chose faite.
Tu joues dans un autre groupe,
Finis Gloria Dei, peux tu nous en dire un mot ?
B.C. : Finis Gloria Dei a commencé
spontanément par une répétition improvisée à 3 (voix, guitare et batterie).
Nous avons sorti 2 demos et 1 album, influencés par les vieux Beherit, Samael,
Impaled Nazarene etc. Le line-up s'est agrandi et nous avons fait quelques
concerts en France, Suisse et Allemagne.
Après notre dernier concert en 2008 à
Paris, la plupart des membres ont quitté ce groupe, il ne restait que Xaphan et
moi; nous avons quand même poursuivi les répétitions avec une boite à rythmes,
mais nous avons perdu notre local.
Les années ont passé, et nous avions
toujours le souhait d'enregistrer ces titres. Récemment je me suis enfin
replongé dans ce projet, j'ai bossé seul sur une douzaine de titres (dont une
grande partie provient de nos vieilles répét/demos improvisées); j'attends
désormais que le batteur ait le temps de s'y consacrer. Xaphan de son côté a
commencé à enregistrer des voix sur quelques morceaux. Ca demandera encore pas
mal de temps, mais c'est en cours.
Quand tu te retournes vers le
passé, les débuts de BIS, quel sentiment as tu ?
O.L.N.M. : beaucoup de temps perdu;
beaucoup de gens peu impliqués, mais si c'était à refaire je le referais malgré
toutes les galères, réussir à continuer, à avancer; une histoire extrêmement
riche à tout points de vue. Un millions de souvenirs délirants,
abracadantesques, beaucoup d'histoires de fou; assez de quoi écrire un livre.
B.C. : effectivement avec le
recul on se rend compte que nous avons perdu énormément de temps. Dès nos
débuts nous avons toujours dépendu des musiciens qui nous accompagnaient, et
pour certains d'entre eux, il y avait un manque de sérieux ou d'implication,
une différence d'univers, de mentalité; de notre côté, malgré une motivation
certaine, il y avait probablement aussi une certaine naiveté, un manque d'organisation,
d'objectif et de moyens, les choses se faisaient surtout sur le moment, sans
penser à plus tard. Je n'ai cependant pas de regret majeur.
Ce livre (NdS : dans lequel sera également publiée l'interview) va traiter d'un grand
nombre de sous-genres du BM, comme le Post-Black, le BlackGaze, le Blackened
Crust et Death, le Bestial War Metal, le Black/Thrash. Que t'évoquent ces
sous-genres ? Le BM est-il aujourd'hui un genre musical parmi d'autres ?
B.C. : Post Black, Black Gaze
et Blackened Crust, ces appellations sonnent comme des abominations... ça me
donne l'impression d'individus voulant récupérer certaines ambiances ou
certains éléments du B.M., tout en dénaturant/rejetant le reste...
Je prendrais l'exemple
d'un phénomène qui semble particulièrement s'amplifier ces dernières années: des gens - qui
souvent n'ont rien à avoir avec le Black – tentant de faire annuler des
concerts, non pas parce qu'il s'y produirait des choses illégales, mais
uniquement car des membres des groupes visés auraient des idées différentes des
leurs. Ces gens ciblent aussi des labels etc., et s'affichent parfois
"anti chrétiens" tout en dénonçant ceux qui sont "anti islam et
anti judaïsme", car ça serait raciste (??!)... ce sont ce genre de choses
qui tendent à faire du B.M. un genre parmi d'autres, en lui enlevant toute sa
substance et ses côtés controversés.
Tout n'était pas mieux
avant, mais du Black "safe" pour bobo, pro LGBT, anti fa et toutes
ces conneries sont au mieux de "l'appropriation culturelle", par des
gens qui d'ordinaire semblent aimer dénoncer ça.
Si le B.M. des années 90
est indiscutablement celui des albums cultes, c'est aussi une période
indissociable de l' "Inner Circle", du Temple of Fullmoon, des Black
Legions etc., des menaces, profanations, incendies d'églises, suicides et
meurtres, des personnes emprisonnées, et une idéologie d'extrême droite
largement répandue. Je crois qu'à cette époque personne n'aurait songé à
considérer cette scène comme étant un genre musical parmi d'autres.
C'est bien entendu une
période depuis longtemps révolue, personne ne s'attends à ce que des personnes
qui sont aujourd'hui dans leur quarantaine (voire plus) reproduisent certains
actes de leur jeunesse, et si bon nombre de vieux groupes ont un certain
succès, font des tournées etc., j'estime pour ma part qu'ils sont tout à fait
légitimes.
Mais on vit une période
pour le moins étrange, ou tout semble possible (notamment le pire): des
Norvégiens qui reçoivent des victoires de la musique, des musiciens en
conflit/procès pour garder le nom d'un groupe, des livres/reportages/un film
sur le Black Metal, Varg qui est devenu "youtuber" (pour un temps du
moins, jusqu'à la censure récente), la vente d'un fragment du crâne de Dead sur
le net, le "Black Metal Bus Tour" à Oslo, le gars de Vlad tepes
faisant un projet avec un gars de sonic youth, Mutiilation jouant au Hellfest
(et signant sur Osmose), Gaahl qui gagne le prix du pédé de l'année en 2010, la
spéculation sur des articles rares/limités, ou plus anecdotique des tasses
"Black Legions"... la liste pourrait être interminable...
Tout cela aurait été
inimaginable dans les années 90...aussi, à cette période les groupes de Black
Metal étaient surtout cantonnés à l'underground, dans un univers très éloigné
de la musique grand public; il me parait intéressant de noter qu'aujourd'hui tous
les styles de musique à travers le monde utilisent désormais les mêmes
moyens/réseaux (sociaux): il semblerait que la globalisation soit aussi passée
par là...
O.L.N.M. : Tous ces “dérivés”
modernes de Black ne m'interessent absolument pas, à part le Black Thrash qui
n'est pas récent, ou le Black Death ... Le Black Metal ne peut se résumer à
un simple style musical et
vestimentaire, c'est un univers qui va bien au delà. Il suffit pour s'en
convaincre de voir comment encore aujourd'hui il reste diabolisé et sujet à
controverses, et tant mieux.
Etant moi-même d'Avignon, je me
suis intéressé à la scène du sud (Death Power, Imperial, Shud, In Articulo
Mortis) dans ma jeunesse et encore aujourd'hui. Il faut avouer que, si la
france est un pays difficile pour le Metal, le sud est encore plus aride.
Comment l'expliques tu ? Que penses tu du succès d'un (jeune) ancien du sud
comme Famine ?
O.L.N.M. : j'ai beaucoup aimé Shud
dans ma jeunesse (j'ai d'ailleurs toujours un vieux t shirt de ce groupe) ainsi
que Death Power (j'adore the bogeyman
)!!! bien evidemment j'ai toujours bcp apprécié In Articulo Mortis. Peut être
que le sud est + propice aux festivités qu'à une musique comme le Black .. le
climat explique peut être en partie le problème ahaha; pas évident d'aller à la
plage en tenue Black Metal . Quant à Famine je pense qu'il a, pour commencer,
un vrai talent; aussi bien musical que commercial, il sait aussi bien composer
que provoquer et à l'heure ou le Black Metal devenait un repère pour bobos bien
pensants il a su remettre un coup de pieds dans la fourmillière; je ne suis pas
fan de tout ce qu'il fait, mais ça reste très intéressant de voir ne serait ce
que la façon qu'il a de tout bien gérer et organiser autour de son groupe, son
univers est parfaitement maitrisé, un bon mix entre punk attitude et provoc
plutot droitarde tout ça avec des références culturelles, historiques ou
littéraires; et ça marche.
B.C. : ces groupes me rappellent des
souvenirs: mon frère avait la cassette
de Death Power "The Bogeyman" (je me souviens surtout du titre
éponyme), quant à Shud je n'ai aucun souvenir de leur musique, mais lorsqu'on
était dans Bloody Ritual on avait joué ensemble à Nancy en 1993.
Nous avons aussi fait des concerts
avec Catacomb et Agressor, ce dernier étant à mon avis le meilleur groupe
Français de Thrash/Death des années 90. Adolescent, mon frère correspondait
avec Witches, et leurs demos sont les 1ères que j'ai jamais écoutées.
Dans le sud il y avait peut-être
moins de public, moins de salle etc. mais il y a eu quand même bon nombre de
concerts intéressants dans les années 90 à Toulon et Marseille (dont j'ai raté
les plus anciens, contrairement à mon frère: Nocturnus, Massacra, Samael,
Metallica, Coroner etc.).
Quant à Peste Noire, je connais très
peu, de ce que j'ai vu/entendu il y a 1 travail et effort global (composition,
textes, pochettes, concept, merchandising), et beaucoup de provocation; la
scène est devenue tellement lisse qu'il y doit y avoir une demande pour des
groupes plus extrêmes. Je ne sais pas si cela peut totalement expliquer leur
succès, et si à titre personnel ça ne m'intéresse pas vraiment, je préfère que
le "succès" aille à des groupes non alignés sur le politiquement
correct.
Tes 20 albums préférés de tous
les temps, tous styles confondus ?
B.C. : Trust IV, Iron Maiden
"Killers", Manowar "Into Glory Ride", Destruction "Mad
Butcher", Slayer "Show no Mercy", Deicide "Deicide",
Morbid Angel "Blessed are the sick", Bathory "Twilight of the
gods", Rotting Christ "Thy
Mighty Contract", Mayhem "De Mysteriis...", Beherit
"Drawing dawn the moon", Tiamat "Wildhoney", Samael
"Blood Ritual", Sigh "Infidel arts", Perunwit "W Kregu
debow", Tormentor "the 7th day of doom", Wongraven
"Fjelltronen", Emperor/Enslaved split, Death in June "Rose clouds
of holocaust", Monumentum "Ad Nauseam".
O.L.N.M. : difficile question...
The doors
"Absolutely live", Iron maiden "Live after death", Manowar
"Kings of metal", Mayhem "De mysteriis dom Sathanas",
Bathory "Bathory", Rotting Christ "Thy mighty contract", Varathron
"His majesty at the swamp", Necromantia "Crossing the fiery
path", Metallica "Master of puppets", Jimi Hendrix "Are you
experienced?", Janis Joplin "Cheaps thrills", Zemial "For
the glory of Ur", Impaled Nazarene "Tol cormpt norz norz norz",
Seigneur voland "Cérémonie chaotique pour un monde mourant", Osculum
infame "Dor-nu-Fauglith", Finis gloria dei "Father of the new
flesh", Kristallnacht "Of elitism and war", Abruptum "De
profundis mors cousumet", Satyricon "Dark medieval times", Darkthrone
"Transylvanian hunger".
Carte blanche Crowleyesque : «
dis ce que tu veux est l'essentiel de la loi »
O.L.N.M. : merci pour l'interview.
B.C.: j'ai l'impression qu'il ne se passe plus grand
chose d'intéressant et que le B.M. vit sur son passé, mais ça fait longtemps
que je ne suis plus vraiment ce qui se passe. Toutefois je suis convaincu qu'il
y a très peu d'albums des années 2000-2010 (et à venir) qui auront un tel
impact que les classiques des années 80-90. Merci pour ton intérêt.
BLESSED IN SIN
LEGENDE DU BLACK METAL FRANCAIS EN INTERVIEW DANS LE SCRIBE DU ROCK
AUTRES GROUPES HISTORIQUES INTERVIEWES CHEZ LE SCRIBE