En ces temps troubles, le politiquement correct et la gestapo de la pensée ont pris le pouvoir sur les internets. Alors qu'il faut demander une autorisation pour péter un coup, une poche de résistance, digne d'un certain village gaulois, résiste envers et contre tout aux milices de la bienséance. De courageux labels resistent, avec les artistes associés bien entendu. Ciel Bleu & Petits Oiseaux, Décimation Sociale, Croux, Dunkelheit Produktionen et le Tombeau des Muses sont à l'honneur aujourd'hui. Au menu, une interview exclusive de Mr Roro Perrot, tête pensante du label Decimation Sociale et homme de multiples projets, dont Vomir, avec lequel il a inventé le sous-genre de "Harsh Noise Wall", version particulièrement radicale du genre, pouvant rappeler, de par ses restrictions auto-imposées le Dogma de Lars Von Trier ("les idiots", "Festen"...) que l'Ouvroir de Littérature Potentielle (OULIPO) (Perec, Calvino, Duchamp et consorts). Nous parcourrons ensuite ensemble quelques œuvres emblématiques du label que j'ai chroniqué pour vous.
Chaque label ensuite aura droit à sa cuvée de chroniques millésimées signées le Scribe du Rock. Ca vous dit, pour bien finir 2019, de prendre quelques tombereaux de Noise sur la figure, de perdre vos repères avant la nouvelle année ? Alors bienvenue dans ce voyage dans les eaux profondes de l'underground le plus exigeant.
In these troubled times, political correctness and the gestapo of thought have taken over the internets. While you have to ask for permission to fart a blow, a pocket of resistance, worthy of a certain Gallic village, resists against all odds to the militias of propriety. Courageous labels resist, with the associated artists of course. Ciel Bleu & Petits Oiseaux, Décimation Sociale, Croux, Dunkelheit Produktionen and the Tombeau des Muses are in the spotlight today. On the menu, an exclusive interview of Mr Roro Perrot, head thinker of the label Decimation Sociale and man of multiple projects, including Vomir, with whom he invented the sub-genre of "Harsh Noise Wall", a particularly radical version of the genre, which can remind, by its self-imposed restrictions, of Lars Von Trier's Dogma ("the idiots", "Festen")....) than the Ouvroir de Littérature Potentielle (OULIPO) (Perec, Calvino, Duchamp et al.). We will then go through together some emblematic works of the label that I reviewed for you.
Each label will then be entitled to its vintage reviews signed by the Rock Scribe. How would you like to end 2019 with a few Noise's tumblers on your face, to lose your bearings before the new year? Then welcome to this journey in the deepest waters of the most demanding underground.
Interview avec Roro Perrot (Vomir, Saboteur Saboteur...)
Que ce soit avec ton projet principal Vomir, ton label DIY Decimation Sociale et les projets/groupes que tu y abrites tu fais la promotion d'un genre que tu as toi même créé : la harsh noise wall. Pourrais tu nous en dire un peu plus sur ce concept et l'histoire derrière ?
Pour être précis, et pour ne pas embrouiller tes lecteurs, le Harsh Noise Wall est associé à mon projet VOMIR, pas aux autres (j’y reviendrai).
VOMIR est issu de recherches sonores que j’ai commencé en 2005, quand ma pratique de la guitare noise me lassait (débutée en 1996) et que je cherchais à produire un bruit continu – mais sans être un ‘drone’. Après quelques noms divers, VOMIR s’est imposé. Je distribuais mes CDR au Bimbo Tower et j’y découvre les productions américaines autour du label iheartnoise, et une pratique similaire à la mienne, notamment de The Rita. Lettres, échanges, coproductions… le Harsh Noise Wall avait ses pionniers (The Rita, Werewolf Jerusallem et moi-même). Des trois, je suis peut-être celui qui a le plus œuvré dans le genre, en y apportant une certaine esthétique (réclusion, refus…), des manifestes etc… en outre je précise que le HNW a de multiples courants, je ne représente qu’une certaine idée du genre…
Quand on écoute les longs drones de distorsion de Vomir on peut penser à Merzbow mais aussi aux pionniers de la power electronics comme Whitehouse. Sont-ce des artistes qui t'ont influencé et, le cas échéant, quels autres artistes ont eu un impact significatif sur ton oeuvre ?
Tout à fait. Mes influences sont multiples, et le japanoise, toute la scène industrielle et PE européenne, la harsh noise US sont mes disques de chevet. En revanche je n’aime pas faire des listes, le ‘name-dropping’… j’oublie toujours quelqu’un et il y en aurait trop. Mais depuis les futuristes jusqu’à aujourd’hui, j’ ai essayé de me constituer une connaissance potable de la musique bruitiste, tout genre confondu.
Quel(s) but(s) t'es-tu fixé avec Décimation Sociale ?
Je n’ai aucun but avec Décimation Sociale, si ce n’est de réaliser mes projets sans rien demander à personne. J’aime aboutir un disque avec une sortie physique, et mes faux labels (tout est DIY) servent à cela. Avant DS, il y a eu MaisonBruit et Period Records. J’édite également des graphzines sous le nom d’Absurdum.
Tu as sorti en septembre 2019 un split entre Vomir et Délinquance Juvénile. Peux tu nous parler un peu de ces derniers et du split lui-même ?
DJ, un projet noise français qui agit également sous le nom de Chibre.
Je fais très souvent des split, je suis souvent contacté pour toutes sortes de sorties et propositions.
Vomir a t'il une volonté de rendre malade l'auditeur ?
Oh absolument pas. Il n’y pas de volonté dans Vomir. Encore moins de rapport à se faire du mal ou à se tourmenter. Le Harsh Noise est tout le contraire. Je pratique le bruit car cela me fait du bien. Un concert de Vomir c’est plutôt se déconnecter complètement. Le bruit a cette faculté de masser les ondes électriques de nos caboches… en revanche, ce n’est pas tout à fait la même chose qu’un joli drone new-age méditatif, tourné vers la beauté et l’empathie. Mon bruit provoque le repli sur soi, l’époché (la mise en parenthèse) de ce qui nous entoure, et des hallucinations auditives.
Parmi tes autres projets on trouve notamment Trou Aux Rats avec lequel tu as sorti un ep en Janvier. Comment distingues tu tes projets ? A première vue Trou aux rats parait moins directement “abrasif” que Vomir ? Bravo pour le jeu de mots sur True Aura !
Trou Aux Rats révèle mon côté romantique et morbide (gothique quoi !). Ce sont des orgues synthétiques improvisés, des litanies lancinantes, des atmosphères parasitées. J’ai sorti deux LP en vinyle, des cassettes, un double CD à venir… un projet avec une esthétique particulière, moi masqué monstrueusement dans les bras de mes love-doll japonaises… Trou Aux Rats est la suite du projet Free As Dead, qui est un court-métrage (visible sur YouTube).
Autre projet, cette fois en compagnie de Yves Botz, Saboteur Saboteur. A l'écoute de votre premier album sorti en septembre, on se dit que vous êtes mûrs pour l'HP, non ? Est ce d'ailleurs une des inspirations de ce projet, la folie et les institutions psychiatriques ?
Cela fait quelques temps que nous jouons avec Yves, un grand Maître pour moi (ses écrits, sa noise guitare dans Dust Breeders…). Il a apprécié mon ‘shit folk’ (aka Roro Perrot) et nous avons décidé de jouer et d’enregistrer ensemble. Saboteur Saboteur (CD) est notre deuxième sortie. C’est peut-être en effet un hommage à l’art brut que nous aimons temps. En tout cas une synthèse malade d’un punk injoué et d’improvisations sauvages.
Restons un peu sur la question de la folie : quelqu'un qui n'a jamais écouté de Harsh Noise qui tombe sur ton bandcamp va flipper un bon coup. Quels sentiments cherches tu a extérioriser ? Est-ce cathartique ? Vois tu une relation avec l'art conceptuel ou la performance ?
On peut rattacher ma pratique bruitiste à de l’art conceptuel ou à de la performance, mes concerts en sont proches (je reste figé sur scène un sac poubelle me couvrant le visage, sacs que j’ai également distribué au public). Mais je revendique surtout le bruit pour le bruit, sans artifice, sans festivité, sans résultat.
Il y a eu aussi Maginot avec Paul Hegarty de SAFE récemment. Un vrai délire de Free Noise avec des relents putréfiés de l'industriel des débuts. Un mot ?
Oui une autre collaboration avec des voix et des bribes bruitistes, dans un maelstrom du ratage. Nous jouons à Londres en février au Café Oto pour la sortie du disque.
Tes 20 albums préférés de tous les temps dans tous les styles ?
Comme je te l’ai dit, impossible pour moi de faire des listes.
Pendant que j’écris j’écoute les boxsets des rééditions du fabuleux label japonais Vanity records.
Ajoutes ce que tu veux, même du bruit !
Merci pour ces questions. Voici des liens pour me trouver :
reclusoir.com
decimationsociale.bandcamp.com
vomir.bandcamp.com
sur YouTube : Roro Perrot
Merci Roro
INTERVIEW RORO PERROT IN ENGLISH
Whether it is with your main project Vomir, your label DIY Decimation Sociale and the projects/groups you host there you promote a genre you created yourself: the harsh noise wall. Could you tell us a little bit more about this concept and the story behind it ?
To be precise, and in order not to confuse your readers, the Harsh Noise Wall is associated with my project VOMIR, not with the others (I'll come back to this later).
VOMIR is the result of sound research that I started in 2005, when I was bored with my noise guitar practice (started in 1996) and wanted to produce a continuous noise - but without being a 'drone'. After a few different names, VOMIR came to the fore. I was distributing my CDRs at the Bimbo Tower and I discovered American productions around the iheartnoise label, and a practice similar to mine, notably of The Rita. Letters, exchanges, co-productions... the Harsh Noise Wall had its pioneers (The Rita, Werewolf Jerusallem and myself). Of the three, I am perhaps the one who worked the most in the genre, bringing a certain aesthetic (imprisonment, refusal...), manifestos etc... moreover I specify that the HNW has multiple currents, I represent only a certain idea of the genre...
When you listen to Vomir's long distortion drones you can think of Merzbow but also of the pioneers of power electronics like Whitehouse. Are these artists who influenced you and, if so, which other artists had a significant impact on your work?
Absolutely. My influences are multiple, and the Japanese, the whole European industrial and EP scene, the US harsh noise are my bedside records. On the other hand I don't like making lists, name-dropping... I always forget someone and there would be too many of them. But from the futurists to today, I've tried to build up a decent knowledge of noise music of all kinds.
What goal(s) did you set yourself with Decimation Sociale?
I have no goal with Decimation Sociale, except to realize my projects without asking anything from anyone. I like to make a record with a physical release, and my fake labels (everything is DIY) are used for that. Before DS, there was MaisonBruit and Period Records. I also edit graphzines under the name Absurdum.
You released a split between Vomir and Délinquance Juvenile in September 2019. Can you tell us a little bit about the latter and the split itself?
DJ, a French noise project that also acts under the name of Chibre.
I very often do splits, I'm often contacted for all kinds of releases and proposals.
Does Vomir have a will to make the listener sick?
Oh absolutely not. There is no will in Vomit. Even less a will to hurt or torment oneself. Harsh Noise is the exact opposite. I practice Noise because it makes me feel good. A Vomir concert is more like a complete disconnection. Noise has this ability to massage the electric waves of our noggas... on the other hand, it is not quite the same thing as a pretty meditative new-age drone, turned towards beauty and empathy. My noise provokes withdrawal, the epochal (the putting in brackets) of what surrounds us, and auditory hallucinations.
Among your other projects are Trou Aux Rats with which you released an ep in January. How do you distinguish your projects? At first glance Trou aux rats seems less directly "abrasive" than Vomir ? Bravo for the pun on True Aura!
Trou Aux Rats reveals my romantic and morbid (gothic) side. They are improvised synthetic organs, haunting litanies, parasitized atmospheres. I released two vinyl LPs, cassettes, a double CD to come... a project with a particular aesthetic, me monstrously masked in the arms of my Japanese love-doll... Trou Aux Rats is the sequel of the Free As Dead project, which is a short film (visible on YouTube).
Another project, this time with Yves Botz, Saboteur Saboteur. Listening to your debut album released in September, one thinks you're ripe for HP, don't you? Is that one of the inspirations for this project, madness and psychiatric institutions?
We've been playing with Yves, a great master for me for some time now (his writings, his noise guitar in Dust Breeders...). He liked my 'shit folk' (aka Roro Perrot) and we decided to play and record together. Saboteur Saboteur (CD) is our second release. Maybe it's indeed a tribute to the art brut that we love at that time. In any case a sick synthesis of injoué punk and wild improvisations.
Let's stick to the madness: someone who's never listened to Harsh Noise falling on your bandcamp will freak out a lot. What feelings are you trying to get out? Is it cathartic? Do you see a relationship with conceptual art or performance art?
You can relate my noise practice to conceptual art or performance art, my concerts are close to it (I stay frozen on stage with a garbage bag covering my face, bags that I also distributed to the public). But above all I claim noise for noise's sake, without artifice, without festivity, without result.
There was also Maginot with Paul Hegarty from SAFE recently. A real Free Noise delirium with putrefied hints of the early industrialist. A word?
Yes, another collaboration with noisy voices and snippets, in a maelstrom of failure. We're playing in London in February at the Café Oto for the release of the album.
Your 20 favourite albums of all time in all styles?
As I told you, it's impossible for me to make lists.
While I write I'm listening to the boxsets of the re-releases of the fabulous Japanese label Vanity records.
Add whatever you want, even noise!
Thank you for these questions. Here are some links to find me:
on YouTube: Roro Perrot
Thank you, Roro.
NOISE IS GOOD FOR YOUR BRAIN
REVIEWS DECIMATION SOCIALE
Free Noise / Mongoloid Noise / Shit Folk
Attention on attaque très fort ! Ici, vous trouverez certes des drones de larsens qui vous broient les tympans ou de bruits industriels dissonants et métalliques mais vous allez aussi découvrir ce que deux hommes, une guitare et un clavier peuvent produire en matière de folie sonore.
D'ailleurs, le mot folie est ici a prendre au sens clinique tant on a la sensation de débarquer dans un HP pendant un atelier création libre chez les trisos accompagnés de psychopathes. 45 minutes non stop composées de voix volontairement débiles, une ambiance malsaine soutenue par des nappes bizarres de claviers et toujours cette idée que l'on est en territoire dangereux pour l'esprit.
Ce bruitisme demande d'être apprivoisé, et ne s'adresse pas aux béotiens en matière de noise. A la limite, passez vous d'abord un Ornette Coleman (free jazz devrait faire l'affaire) et si vous le supportez risquez vous. Pourtant, au fil des minutes, ce gros bordel improvisé dévoile une certaine beauté sauvage qu'il faut laisser émerger. La question étant : aurez vous le courage ? Car, au fond, en matière de Noise, le courage est une vertu : passé le côté effrayant et déstabilisant c'est l'art qui prend le relais.
Be careful, we're attacking very hard! Here you will certainly find feedback drones that crush your eardrums or dissonant and metallic industrial noises, but you will also discover what two men, a guitar and a keyboard can produce in terms of sonic madness. Moreover, the word madness is here to be taken in a clinical sense, as you have the feeling to land in a loudspeaker during a free creation workshop with trisos accompanied by psychopaths. 45 minutes non stop composed of deliberately stupid voices, an unhealthy atmosphere supported by strange layers of keyboards and always this idea that we are in dangerous territory for the mind.
This noisiness needs to be tamed, and is not for the bohemians when it comes to noise. In the end, first get yourself an Ornette Coleman (free jazz should do the trick) and if you can stand it, risk it. However, as the minutes go by, this big improvised mess reveals a certain wild beauty that you have to let emerge. The question being: will you have the courage? Because, deep down, when it comes to Noise, courage is a virtue: once you get past the frightening and destabilizing side, it's art that takes over.
Free Noise / Fréquences / Noise
Samples de radio américaine des années 50/60, bruits parasites, fréquences diverses, distorsion, chant mongoloïde sont au menu de ce projet de Romain Perrot et Paul Hegarty (de Safe). Si l'abord n'en n'est pas toujours évident, on est loin de l’extrémisme radical de Saboteur, Saboteur. On notera au passage un superbe hommage à Edgar Froese de Tangerine Dream ("Edgar Froese") et un "Drain" de quasi 15 minutes qui mêle bruits en field recordings, radio de la CIA, psalmodies inquiétantes, bruit pur.
"Push Final" reconduit cette litote de la CIA qui revient tout du long de l'album et les deux musiciens l'enrobent de divers bruits parasites d'origines variées.
L'écoute de cet album peut se faire sans précaution, tant le côté répétitif peut devenir support à une forme de méditation et de repli sur soi. Besoin d'introspection ? Ça tombe bien ! Une oeuvre qui, bien que radicale dans sa forme, peut devenir rapidement addictive. Attention, toutefois, si vous réécoutez de la musique "normale" après cela, il se peut que vous trouviez ça bizarre.
Samples of American radio from the 50/60's, parasitic noise, various frequencies, distortion, mongoloid singing are on the menu of this project by Romain Perrot and Paul Hegarty (from Safe). If the approach is not always obvious, it is far from the radical extremism of Saboteur, Saboteur. One will note in passing a superb tribute to Edgar Froese from Tangerine Dream ("Edgar Froese") and a nearly 15 minutes long "Drain" which mixes field recordings, CIA radio, disturbing psalmodies, pure noise.
"Push Final" renews this CIA's understatement which comes back all along the album and the two musicians coat it with various parasitic noises of various origins.
Listening to this album can be done without precaution, so much the repetitive side can become support to a form of meditation and withdrawal. In need of introspection? Good timing! A work which, although radical in its form, can quickly become addictive. Beware, however, if you listen to "normal" music again afterwards, you may find it strange.
Samuel Beckett : "Déjà essayé. Déjà échoué. Peu importe. Essaie encore. Échoue encore. Échoue mieux."
Ultra Shit Folk
Romain Perrot est un artiste. Bon, dit comme ça c'est sûr que ça ne vous apporte pas grand chose. Roro est un artiste pur : il ne se met pas de limites, ni commerciales, ni liées à la perception de l'auditeur. Ce projet solo, dans un genre qu'il a baptisé Ultra Shit Folk alterne entre morceaux "folk" désaccordés où la guitare n'en donne qu'à sa tête tandis que le chant ressemble a un grognement rentré au fond de la gorge et passages de guitare saturée à faire se retourner Jimi Hendrix dans sa tombe. Basé sur la fameuse citation de Beckett ici reproduite en exergue, cet album en 28 "échoue" illustre magnifiquement le propos : chaque morceau ressemble à l'ébauche de ce qu'il aurait pu être, et à, en même temps, quelque chose de définitif. Fort addictif, cet album me fait penser à un homme des cavernes ayant découvert par saut quantique une guitare folk et une guitare électrique et les aurait ramenés avec lui dans son temps : une approche intuitive, jouissivement enfantine de la musique, tel un Picasso tentant toute sa vie d'apprendre a dessiner et à peindre comme un enfant.
Quelque part entre la folie furieuse et la beauté pure se trouve le travail de Romain Perrot : un lâcher prise artistique fascinant.
Romain Perrot is an artist. Well, when you put it like that, it's sure not much good for you. Roro is a pure artist: he doesn't set himself limits, neither commercial nor linked to the listener's perception. This solo project, in a genre he has christened Ultra Shit Folk, alternates between detuned "folk" tracks where the guitar is at his head while the vocals are like a grunt stuck in the back of the throat and saturated guitar passages that make Jimi Hendrix turn over in his grave. Based on Beckett's famous quotation reproduced here as an exergue, this 28 tracks album "fails" illustrates the point magnificently: each track looks like the outline of what it could have been, and at the same time, something definitive. Highly addictive, this album reminds me of a caveman who discovered by quantum leap a folk guitar and an electric guitar and would have brought them back to his time: an intuitive, childishly enjoyable approach to music, like a Picasso trying all his life to learn to draw and paint like a child.
Somewhere between furious madness and pure beauty lies the work of Romain Perrot: a fascinating artistic release.
VOMIR - HERE GOES NOTHING (DECIMATION SOCIALE 2015)
Harsh Noise Wall / Free Noise
Aaaaah ! Vomir, quel bonheur ! C'est avec ce projet que Romain Perrot a défini les contours de la Harsh Noise Wall, ce mur du son grésillant sans modulations digne des albums les plus exigeants de Whitehouse ou Merzbow. Au milieu des dizaines de sorties de Vomir, voici cet album de 2015, "Here Goes Nothing". Une oeuvre contenue en une seule pièce de 35 minutes pouvant sembler au départ particulièrement absconse et difficile d'accès. Pourtant, en faisant un petit effort, on se laisse embarquer par ce drone de bruit blanc qui a rapidement un effet méditatif sur le cerveau. Bien sûr, c'est le principe de la Harsh Noise Wall, ici point de mélodie, de rythme ou d'accords musicaux : c'est un bruit pur mis en scène, donné en situation dans sa forme la plus free. Essayez de fermer les yeux, respirez profondément, vous pourrez alors apprécier ce qui peut sembler au départ une oeuvre profondément nihiliste mais, comme le dit Romain, est en fait empreinte d'une certaine beauté, et, pour le citer mot pour mot
"Le bruit a cette faculté de masser les ondes électriques de nos caboches… en revanche, ce n’est pas tout à fait la même chose qu’un joli drone new-age méditatif, tourné vers la beauté et l’empathie. Mon bruit provoque le repli sur soi, l’époché (la mise en parenthèse) de ce qui nous entoure, et des hallucinations auditives."
La musique de Vomir a bien un effet sur le cerveau, mais pas forcément un effet NEGATIF. Sous cette absence de fioriture, d'effets de manche et de "jolis drones" comme le dit Romain, se cache une mélopée qui nous renvoie aux premiers âges : à la création de la création.
Aaaaah! Vomir, what happiness! It is with this project that Romain Perrot has defined the contours of the Harsh Noise Wall, this sizzling wall of sound without modulations worthy of the most demanding Whitehouse or Merzbow albums. In the middle of the dozens of Vomir's releases, here is this 2015 album, "Here Goes Nothing". A work contained in a single piece of 35 minutes that may at first seem particularly abstruse and difficult to access. Yet, with a little effort, we let ourselves be carried away by this white noise drone that quickly has a meditative effect on the brain. Of course, this is the principle of the Harsh Noise Wall, here no melody, no rhythm or musical chords: it is a pure staged noise, given in situation in its freest form. Try to close your eyes, take a deep breath, you will then be able to appreciate what may at first seem a deeply nihilistic work but, as Romain says, is in fact imbued with a certain beauty, and, to quote him word for word
"Noise has this ability to massage the electric waves of our noggas... on the other hand, it's not quite the same as a pretty meditative new-age drone, turned towards beauty and empathy. My noise causes withdrawal, the epochalization of our surroundings, and auditory hallucinations."
Vomir's music does have an effect on the brain, but not necessarily a NEGATIVE effect. Beneath this absence of flourishes, neck effects and "pretty drones" as Romain says, lies a melody that takes us back to the early ages: to the creation of creation.
Difficile de faire plus underground que le label "ciel bleu & petits oiseaux". Un nom qui se fout du référencement google, une absence des réseaux sociaux, une communication réduite au strict minimum : un site uniquement permet d'accéder aux productions du label : http://cielbleuetpetitsoiseaux.blogspot.com/
Nous parlons ici d'un label qui ne distribue ses produits qu'en cassettes, voire même disquettes ! (véridique !) et quelques cd et cd-r en distro. Au pays de Ciel Bleu & Petits Oiseaux, c'est au public d'aller chercher les groupes. Pas de bandcamp ou de youtube : à l'ancienne, vous commandez vos tapes et basta.
Petit tour du propriétaire avec les reviews ci-dessous : nous allons y fréquenter d'étranges entités supraterrestres nommées Trou, Valvan, John Doe ou Romprai Etron qui n'ont pas, à priori, de volonté réelle de sortir de l'ombre. Pour faire le lien avec Decimation Sociale, sachez que Romain Perrot et son Vomir ont aussi sévi au travers de splits sur ce label.
Harsh Noise Wall
(Ciel Bleu & Petits Oiseaux 2018)
Côté Valvan tout commence par une scène étrange d'une femme en train de baiser dont le mari, manifestement en colère, essaie de rentrer en forçant la porte. Puis vient une nappe de bruit blanc qui recouvre les mots, que l'on distingue vaguement de loin. Comment distinguer une vague de bruit blanc d'une autre me direz-vous ? Eh bien c'est dans les infimes nuances que tout se joue. Dans le domaine radical et absolutiste de la Harsh Noise Wall c'est un peu comme dans le goregrind ou le noisegrind, tout se cache dans les détails. Ici une scène de dispute qui va sans doute dégénérer donne le ton, s'en suit une masse de bruit linéaire, semblable a ce que l'on peut trouver chez Vomir.
:format(jpeg):mode_rgb():quality(40)/discogs-images/R-11424781-1516098926-1265.jpeg.jpg "Valvan . Trou (Cassette, Limited Edition) pochette d'album") |
| SPLIT TAPE VALVAN/TROU |
Pendant 20 minutes va sévir ce titres de Valvan baptisé "Dementium".
Après quoi les "rockstars" du label (lol) Trou vont prendre le relais sur un titre nommé "Le dernier pillier".
Voici en exergue une définition du Harsh Noise Wall signée de son géniteur, Romain "Vomir" Perrot :
"Le harsh noise Wall est un mur sonore continu, monolithique, hyper puissant et fabriqué avec le strict minimum.
Son métier est d'immerger complètement le public dans un mur de bruit blanc : un son composé de toutes les fréquences audibles, chaque fréquence ayant la même énergie.
Sous le nom de projet "VOMIR", Romain Perrot utilise des murs de bruit blanc pour rendre compte de la sensation de confinement et d'isolement par le son.
Pendant toute la durée de ses performances, il laisse ses machines en marche et reste debout, immobile, dos au public avec un sac plastique sur la tête."
Dans le domaine de la Harsh Noise Wall, comme de la Noise ou du Power Electronics, l'aspect conceptuel est aussi important que le son (voire même plus) et l'on se retrouve dans un univers qui peut provoquer les mêmes sentiments de rejet/adhésion que ce que peut produire l'art contemporain le plus élitiste en comparaison avec l'art "classique" ou figuratif plus "acceptable" pour un public de non-initiés.
Ainsi, le morceau de Valvan se termine t'il par un retour de notre "couple" bien mal en point. On ne saisit pas forcément bien ce que baragouine le mari furieux mais on sent que ça va dégénérer.
C'est alors que Trou vient nous délivrer de la tragédie.
"Le Dernier Pillier" est beaucoup moins abrasif que le titre de Valvan et le drone de bruit proposé est tout de suite apaisant. C'est d'ailleurs une faculté que l'on retrouve souvent dans l'oeuvre de Trou : un bruit blanc méditatif, plutôt paisible, aux limites de l'ambient. Des sonorités non identifiées viennent de temps en temps perturber la quiétude du titre.
La face B de la cassette continue, laissant la place aux nappes de Trou...
On the Valvan side, it all starts with a strange scene of a woman having sex whose husband, obviously angry, tries to force his way in. Then comes a sheet of white noise that covers the words, which can be vaguely seen from afar. How do you distinguish one wave of white noise from another, you might ask? Well, it's in the minute nuances that it all comes down to. In the radical and absolutist domain of Harsh Noise Wall it's a bit like in goregrind or noisegrind, everything is hidden in the details. Here a scene of quarrel that will no doubt degenerate sets the tone, a mass of linear noise follows, similar to what can be found in Vomir.
For 20 minutes, this Valvan song called "Dementium" will be raging.
After which the "rockstars" of the label (lol) Trou will take over on a track called "Le dernier pillier".
Here is a definition of Harsh Noise Wall signed by its progenitor, Romain "Vomir" Perrot:
"The Harsh Noise Wall is a continuous, monolithic, hyper-powerful wall of sound made with the bare minimum.
Its job is to completely immerse the audience in a wall of white noise: a sound composed of all audible frequencies, each frequency having the same energy.
Under the project name "VOMIR", Romain Perrot uses white noise walls to convey the sensation of confinement and isolation through sound.
Throughout his performances, he leaves his machines running and remains standing, motionless, with his back to the audience with a plastic bag over his head".
In Harsh Noise Wall, like Noise or Power Electronics, the conceptual aspect is as important as the sound (or even more so) and one finds oneself in a universe that can provoke the same feelings of rejection/acceptance that the most elitist contemporary art can produce in comparison to the more "classical" or figurative art that is more "acceptable" to a non-initiated public.
Thus, Valvan's piece ends with a return of our "couple" in a bad way. We don't necessarily understand what the angry husband is talking about, but we feel that it's going to degenerate.
That's when Trou comes to rescue us from the tragedy.
"The Last Pillar" is much less abrasive than Valvan's title and the proposed noise drone is immediately soothing. It's a faculty we often find in Trou's work: a meditative, rather peaceful white noise, at the limits of the ambient. From time to time, unidentified sounds disturb the quietness of the title.
The B side of the cassette continues, leaving room for Trou's lay
ROMPRAI ETRON - LE THÉÂTRE DE LA MORT CÉRÉBRALE
(CBPO 2017)
FREE NOISE
Romain Perrot commençait à nous manquer. De fait, le revoici. Habillé de l'une de ses multiples incarnations, cette fois Romprai Etron, le pape du Harsh Noise Wall donne à entendre quelque chose de purement effrayant ici. Fait de voix trafiquées monstrueuses et/ou diaboliques et de bruits dignes d'une chantier indoor combiné à la réverbération d'un opéra, ce "théâtre de la mort cérébrale" est d'une aridité et d'un extrémisme particulièrement poussés. Roro n'a pas pour habitude de faire dans la demi-mesure, ces travaux avec Vomir sont là pour en témoigner. Romprai Etron est sidérant, laissant gémir les machines en roue libre, hurlant leur désespoir numérique.
Bande son d'une apocalypse intérieure, cette cassette ne s'adresse qu'aux plus aventureux, ceux qui voient la noise comme le dernier territoire à envahir de nos bruits corporels infâmes et beaux à la fois. Jusqu'à la limite.
We were beginning to miss Romain Perrot. In fact, here he is again. Dressed in one of his many incarnations, this time Romprai Etron, the pope of the Harsh Noise Wall gives us something purely frightening to hear here. Made of monstrous and/or diabolical manipulated voices and noises worthy of an indoor construction site combined with the reverberation of an opera, this "theatre of brain death" is particularly arid and extreme. Roro is not in the habit of doing half-measures, this work with Vomir is there to testify to this. Romprai Etron is staggering, letting the freewheeling machines groan, shouting their digital despair.
A soundtrack to an inner apocalypse, this tape is only for the most adventurous, those who see noise as the last territory to invade our infamous yet beautiful body noises. Up to the limit.
J'ai déjà ici publié interviews (Subduer et RxAxPxe) et chroniques de ce label allemand dédié à la fois au Metal extrême le plus bruitiste (Kapala, Subduer) et à la Noise la plus violente (RxAxPxE, Scatmother). Un label dédié aux musiques les plus bruyantes et malveillantes qui soient : idéal pour le scribe !
Voici deux chroniques assez représentatives de la démarche extrême du label...
I've already published here interviews (Subduer and RxAxPxE) and reviews of this German label dedicated to both the most noisy extreme Metal (Kapala, Subduer) and the most violent Noise (RxAxPxE, Scatmother). A label dedicated to the noisiest and most malicious music: ideal for the scribe!
Here are two reviews quite representative of the label's extreme approach...
BRAHMASTRIKA - EXCARNASTRIAL COMMENCINATION
Aux confins de l'extrême, au confluent de genres barbares comme le Nuclear War Metal et de la Noise la plus vicieuse se trouvent d'étranges bêtes bruyantes comme Brahmastrika. Comme leurs comparses de label de Subduer ou Kapala, les indiens ici réunis (comme Kapala, là aussi, mais aussi les pionniers du Noise Metal indien Tetragrammacide dont ils se revendiquent) assument fièrement un statut de terroristes sonores. Ici toute mélodie à disparu : du Metal ne reste plus que quelques guitares ultra-saturées, des beuglements de babouin en rut et une batterie qui joue à la vitesse de la lumière, tout ce que vous entendrez d'autre est bien du bruit total. Une noise agressive, brutale, primitive, sans parti pris intellectuel ni même esthétique (hormis celui de la destruction totale de l'humanité). On reproche souvent à ce type de groupes ultimes une linéarité due à l'absence d'approche musicale au sens mélodique du terme : Brahmastrika s'avèrent bien éprouvants sur la durée, mais arrivent tout de même à diversifier leur propos (grâce notamment à des samples ou des passages plus "ritualistes" et moins directement brutaux). Il va de soi que l'écoute d'un tel obus de mortier ne se fait pas en dégustant des produits de terroir, mais plutôt en se focalisant sur la bestialité de l'ensemble : effrayant !
At the edge of the extreme, at the confluence of barbaric genres like Nuclear War Metal and the most vicious Noise, there are strange noisy beasts like Brahmastrika. Like their label mates of Subduer or Kapala, the Indians here (like Kapala, there too, but also the pioneers of the Indian Noise Metal Tetragrammacid they claim to be) proudly assume the status of sound terrorists. Here, all melody has disappeared: Metal only remains a few ultra-saturated guitars, rutting baboon bellows and drums playing at the speed of light, all you'll hear else is total noise. An aggressive, brutal, primitive noise, without any intellectual or even aesthetic bias (except for the one of the total destruction of humanity). We often reproach this kind of ultimate bands for a linearity due to the absence of a musical approach in the melodic sense of the term: Brahmastrika prove to be quite trying over time, but still manage to diversify their purpose (thanks to samples or more "ritualistic" and less directly brutal passages). It goes without saying that listening to such a mortar shell is not done by tasting local products, but rather by focusing on the bestiality of the whole: frightening!
POWER ELECTRONICS - PURE NOISE
ATTENTION ! Je ne le dis pas pour plaisanter : dans notre crescendo vers l'ultime, nous atteignons ici un point de danger y compris physique. L'écoute d'un tel album ne doit pas se faire à fort volume au risque d'y laisser vos tympans.
Les psychopathes de Scatmother vous accueillent avec 5 titres de Power Electronics d'une violence insoutenable, chargés de haine, de fréquences suraigues, de drones de bruit dévastateurs, de hurlements sauvages : nous sommes ici aux confins du supportable : Whitehouse en version augmentée. D'aucuns ne verront pas du tout l'intérêt artistique d'une telle démarche : il en va du Power Electronics comme de l'Art Contemporain (dont la Noise fait de toutes façons partie) : vous détesterez ou vous serez dérangés, fascinés, et puis accros !
Chez Chaos Cascade (allemands, tout comme Scatmother) l'ambiance n'est pas plus accueillante : tout juste peut on souligner le caractère moins "aigu" et bruyant de leur Noise radicale, mais la démarche de terreur sonore est bien la même. Vous cherchez un exemple d’extrémisme sonore absolu ? Soyez les bienvenus !
WARNING! I'm not saying it in jest: in our crescendo towards the ultimate, we reach here a point of danger, including physical danger. Listening to such an album should not be done at high volume at the risk of leaving your eardrums in it.
The psychopaths of Scatmother welcome you with 5 tracks from Power Electronics of unbearable violence, full of hatred, high frequencies, devastating noise drones, wild howls: we are here at the limits of the bearable: Whitehouse in an augmented version. Some people will not see the artistic interest of such an approach at all: it is the same for Power Electronics as for Contemporary Art (of which Noise is part anyway): you will hate or you will be disturbed, fascinated, and then addicted!
At Chaos Cascade (German, just like Scatmother) the atmosphere is no more welcoming: one can only just underline the less "high-pitched" and noisy character of their radical Noise, but the approach of sound terror is the same. Looking for an example of absolute sound extremism? You're welcome!
LE TOMBEAU DES MUSES
Le Tombeau des Muses est un label qui propose depuis quelques temps déjà de très belles compilations baptisées "Sessions" sur lesquelles il propose de partir à la découverte de projets Power Electronics, Harsh Noise, Indus et autres folies sonores. Autour du projet phare du label, Choisir le Pire, on trouve ainsi des formations au doux patronymes tels que Chier, La Nuit Qui Tombe, ÄÄRVÖ et autres IA-HA-CRAX. Pour vous présenter le label j'ai choisi de vous parler de leur dernière compilation en date (les "Sessions n°IV") et de "Faits d'Armes", le dernier enregistrement live en date de Choisir le Pire.
Le Tombeau des Muses is a label that has been offering for some time now very nice compilations called "Sessions" on which it proposes to discover Power Electronics, Harsh Noise, Indus and other sound madness projects. Around the label's flagship project, Choisir le Pire, we find bands with sweet names such as Chier, La Nuit Qui Tombe, ÄÄRVÖ and others IA-HA-CRAX. To present the label I chose to tell you about their latest compilation ("Sessions n°IV") and "Faits d'Armes", the last live recording of Choisir le Pire.
NOISE/HARSH NOISE/POWER ELECTRONICS
Il est déjà difficile de chroniquer un album de Noise (car le genre est si particulier et conceptuel qu'il en devient difficilement descriptible) alors imaginez ce que ça donne quand il s'agit d'évoquer une compilation réunissant seize groupes ou projets pouvant se regrouper sous cette étiquette généraliste de Noise, Harsh Noise ou Power Electronics. Le Tombeau des muses, au travers de ces sessions, présente les groupes de son catalogue, à savoir Choisir le Pire, Chier, äärvo et autres mais également quelques pointures du genre comme Vomit (coucou le revoilou), Assaillant et autres démons du bruit.
A chaque compilation, un thème de travail...
"Thésée trouva le Minotaure, le tua, à mains nues selon Apollodore et retrouva son chemin dans le labyrinthe grâce à la bobine déroulée" (La légende Mythologique de Thésée et le Minotaure)
Ici, comme vous l'aurez compris, c'est le thème du dédale (nom du créateur du labyrinthe ou se trouve le fameux minotaure) et de l'errance qui sont exploités.
Thèmes qui vont comme un gant à ces projets nauséeux, dérangeants, noirs ou blafards selon les goûts. Si vous êtes arrivés jusqu'à ces lignes (chapeau !) vous l'avez compris : ces musiques ne restent pas tapies dans l'ombre pour rien, car elles révèlent bien tout le malaise de l'âme humaine, réveille la folie tapie en nous et peut-être dangereuse.
Au menu donc la Harsh Noise Wall de Choisir le Pire, un morceau de Varlsbrand qui me rappelle bizarrement les débuts de Die Form, Traitors pour un titre qui démarre comme du Dark Ambient pour se transformer en Harsh Noise douloureuse, Un Regard Froid qui, au contraire, démarre par une nappe noise pour ensuite développer un titre davantage electro dark (mais vraiment dark !), Ci-git qui nous propulse dans une sorte d'EBM noirci, Assaillant qui ne fait pas de détail et nous détruit le cerveau d'un drone de bruit blanc extrême de plus de 7 minutes (avec quelques mélodies sombres savamment cachées), Syndérèse pour un morceau étrange, mettant en scène une sorte de piano déglingué et distordu, Chier et leur Harsh Noise Wall impitoyable, Reaper un peu dans le même "trip", Blackwatch m'ont fait penser à un groupe de Krautrock type Amon Duul ou Popol Vuh qui auraient avalé un acide de trop et fait un mauvais trip, La-Ha-Crax fait dans le bruit distordu et méchant, Camecrude parait presque "apaisant" avec ce monologue présentant le labyrinthe et le minotaure comme une sorte de jeu vidéo, Yoke fait dans l'ambient noisy.
Äärvö ont, semble t'il, perdu la boule et sont en pleine errance mentale chez Dedale, on retrouve un Vomir avec Roro Perrot fidèle à lui-même tandis qu'Action de Grâce termine avec une sorte de chant grégorien sous amphétamines.
Au final une compilation passionnante car suffisamment diversifiée pour accrocher même le béotien.
It's already difficult to review a Noise album (because the genre is so peculiar and conceptual that it's hard to describe it) so imagine what it's like to evoke a compilation gathering sixteen bands or projects that could be grouped under this generalist label of Noise, Harsh Noise or Power Electronics. Le Tombeau des muses, through these sessions, presents the bands of its catalogue, namely Choisir le Pire, Chier, äärvo and others, but also some big names of the genre like Vomit (cuckoo the revoilou), Assassillant and other noise demons.
For each compilation, a working theme...
"Theseus found the Minotaur, killed him with his bare hands according to Apollodore and found his way back into the labyrinth thanks to the unwound reel" (The Mythological Legend of Theseus and the Minotaur).
Here, as you will have understood, it is the theme of the maze (name of the creator of the labyrinth where the famous minotaur is located) and wandering that are exploited.
Themes that go like a glove to these nauseous, disturbing, black or pale projects according to your tastes. If you've reached these lines (hat!) you've understood it: these musics don't remain lurking in the shadows for nothing, because they reveal all the malaise of the human soul, awaken the madness lurking in us and perhaps dangerous.
So, on the menu is the Harsh Noise Wall of Choisir le Pire, a track by Varlsbrand that strangely reminds me of the beginnings of Die Form, Traitors for a track that starts like Dark Ambient and turns into a painful Harsh Noise, Un Regard Froid that, on the contrary, starts with a layer of noise and then develops into a more electro dark track (but really dark!).), Ci-git that propels us into a kind of blackened EBM, Assaillant that doesn't make details and destroys us the brain of an extreme white noise drone of more than 7 minutes (with some dark melodies cleverly hidden), Syndérèse for a strange track, featuring a kind of ramshackle and distorted piano, Chier and their merciless Harsh Noise Wall, Reaper a bit in the same "trip", Blackwatch made me think of a Krautrock band like Amon Duul or Popol Vuh who would have swallowed one acid too many and made a bad trip, La-Ha-Crax does in the distorted and nasty noise, Camecrude seems almost "soothing" with this monologue presenting the labyrinth and the minotaur as a kind of video game, Yoke does in the noisy ambient.
Äärvö have, it seems, lost their minds and are in full mental wandering at Dedale's, we find a Vomir with Roro Perrot faithful to himself while Thanksgiving ends with a kind of Gregorian chant on amphetamines.
In the end a fascinating compilation because it's diverse enough to catch even the most philistine of people.
HARSH NOISE WALL/POWER ELECTRONICS
Voici une compilation d'enregistrements live de Choisir Le Pire réalisés dans différentes villes (Metz, Genève et Tours) et paru en Avril 2019.
Au menu cinq titres. Tout commence avec "Citadelles", capté à Genève, et mettant en son un mélange splendide de musique médiévale et de harsh noise wall : je n'avais pas encore entendu ce type de mix et j'avoue que ça fonctionne carrément. "Place Forte", enregistré cette fois à Metz, joue avec nos nerfs, distillant assauts sonores sous forme de drones saturés et de chambre d'écho, créant une sensation de trouver "une nouvelle forme de beauté" (pour paraphraser Virgin Prunes). En effet, pour une raison qui m'est inconnue et qui n'appartient qu'à l'art, les passages les plus violents de Choisir Le Pire dégagent une attraction particulière, mêles aux voix saturées et jouant avec le silence, l'espace et les tonalités : on ne s'en lasse jamais. Comme une possession sonore.
"Tranche-Lys", pris à Tours, commence en douceur, avec les dialogues du public (?) qui se mélangent à la performance du groupe. Cet effet étrange, ressemblant presque à une captation involontaire, produit une dissension troublante entre la banalité des propos et la sauvagerie de la performance.
"Il faut asséner le coup de grâce à ce monde mourant" nous dit Choisir le Pire à propos de "Prêche" sur leur Bandcamp. Il est vrai que si la fin devait advenir, elle pourrait parfaitement ressembler à cela sur un plan sonore.
"Représentation du six" clôture les débats de façon occulte et bestiale.
Un live fascinant, très addictif, idéal comme introduction à la noise la plus Harsh.
On the menu are five tracks. It all starts with "Citadelles", captured in Geneva, and featuring a splendid mix of medieval music and harsh noise wall: I hadn't heard this kind of mix before and I must admit it works. "Place Forte", recorded this time in Metz, plays with our nerves, distilling sound assaults in the form of saturated drones and echo chamber, creating a sensation of finding "a new form of beauty" (to paraphrase Virgin Prunes). Indeed, for a reason that is unknown to me and that only belongs to art, the most violent passages of Choisir Le Pire exude a particular attraction, mixing with saturated voices and playing with silence, space and tonalities: we never get tired of it. Like a sonic possession.
"Tranche-Lys", taken in Tours, starts out softly, with the audience's dialogues (?) mixing with the band's performance. This strange effect, almost resembling an involuntary capture, produces a troubling dissension between the banality of the words and the savagery of the performance.
"We must strike the final blow to this dying world" says Choisir le Pire about "Prêche" on their Bandcamp. It's true that if the end were to come, it could perfectly resemble this on a sonic level.
"Representation of the Six" closes the proceedings in an occult and bestial way.
A fascinating, highly addictive live performance, ideal as an introduction to the most Harsh noise.
D.I.Y record label dedicated to audio violence
Contrairement aux autres labels évoqués ci-dessus, Croux n'est pas un label spécialisé dans la Noise ou le Power Electronics. A dire vrai, ce qui fait le charme et la spécificité de ce jeune label est bien de mélanger toutes sortes de musiques, au travers d'artistes d'obédiences différentes n'ayant qu'un point commun : une folie totale et une envie de proposer quelque chose de foncièrement différent. Ainsi vous pourrez retrouver chez Croux la dinguerie Punk/Black Metal au pays des fées de l'excellent Nuit Noire (bientôt en interview dans le Scribe), Mongolito et leur Rock/Ambient expérimental et envoûtant, Bière Noire et leur Post-Punk déglingué et inclassable, et d'autres.
Pour rester dans le thème de la noise, nous allons nous intéresser ici à Accès de Faiblesse, qui distille un Power Electronics ultra violent
Contrary to the other labels mentioned above, Croux is not a label specialized in Noise or Power Electronics. To tell the truth, what makes the charm and the specificity of this young label is to mix all kinds of music, through artists from different backgrounds with only one thing in common: a total madness and a desire to offer something fundamentally different. So you can find at Croux the Punk/Black Metal dinguery in the land of the fairies of the excellent Nuit Noire (soon in interview in the Scribe), Mongolito and their experimental and bewitching Rock/Ambient, Bière Noire and their ramshackle and unclassifiable Post-Punk, and others.
To stay on the theme of noise, we're going to focus here on Accès de Faiblesse, which distils ultra violent Power Electronics.
POWER ELECTRONICS/HARSH NOISE
On pourra faire une chronique très courte de cet album : tout est dans le titre, au revoir !
Pas de répit, en effet, car accès de faiblesse ne font pas dans la dentelle. Proposant un Power Electronics abrasif à l'extrême mettant en scène la folie de vocaux sursaturés (parfois pas si loin du Black Metal Noise le plus ultime façon Gnaw Their Tongues ou Enbilulugugal) et une ambiance noire de suie, Accès de Faiblesse ressemble à s'y méprendre à la bande son de la mise à mort du genre humain.
Ainsi, si vous y trouverez quelques convergences avec Vomir ou Choisir le Pire, la particularité d'Accès de Faiblesse réside dans une non-linéarité sonore, une matière bruitiste en mouvement perpétuel.
Ca change la donne, je ne vais pas mieux
Le temps défile, à la vitesse
D'une tournante, dans les haut-de-seine !
Le temps lacère, me griffe m'agresse
Ne plus y croire, je me dégueule. (extrait du Bandcamp du groupe)
Oui cette musique ne va pas non plus nous faire aller mieux, et nous lacère comme le temps. Je ne crois plus pour ma part à l'aspect cathartique de la musique : c'est un prétexte. Le but de ce genre de musique n'est pas le développement personnel : elle questionne le plus sombre de vos entrailles, elle creuse dans les sillons profonds de votre inconscient, tout ce que vous aimeriez garder caché.
Une splendeur empoisonnée.
BIENTÔT DANS LE SCRIBE
INTERVIEW LABEL AVEC CROUX RECORDS
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