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INTERVIEW - ANGES DE LA MORT - BLACK METAL DU QUEBEC ! - FR + ENGLISH - MAI/JUILLET 2020
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Anges de La Mort, ou ADLM, sont un de ces excellents groupes que nos cousins québécois savent donner au monde du Black Metal (ou Metal Noir québécois selon les cas)...Auteurs de deux EPs de grande qualité sortis en format cassette chez le label Les Productions Hérétiques, ces pourvoyeurs d'un Black Metal Old School empreint d'influences Speed/Thrash nous ravissent les oreilles d'un sens du riff indéniable et d'une appétance pour la noirceur des plus contagieuses ! Explications avec les intéressés...
" Dans une ère de mondialisation outrancière qui tend à affaiblir les piliers de nos cultures respectives, j’aime penser que ce genre de scènes puissent porter une force identitaire, une résistance contre ces systèmes internationaux dominants nous éloignant de nos racines"
Bonjour amis de Montréal ! Comment allez vous
en cette période tragico/étrange ?
Salutations ! Des
temps étranges en effet. J’imagine qu’on s’efforce de passer au travers de
notre mieux, chacun de notre côté. Du tragique certes, mais aussi quelque chose
d’intéressant, dans le retranchement forcé vers certaines de nos limites.
Constater ce qui ressort de certains humains ou organisations, comme si on
faisait tomber certains voiles. Et peut-être finalement un coup de pied dans la
fourmilière, un retour de flamme bien mérité pour l’humanité, et surtout
l’homme moderne. Ironiquement c’est une thématique et le concept derrière le
nom « Anges de la Mort », la menace et la vengeance des anciens
esprits de la Terre sur l’humain contemporain et son esprit embrouillé, infecté
par l’or, irrespectueux et déconnecté de la Nature.
Si j'en crois le peu d'infos que j'ai trouvé
vous concernant, vous êtes un groupe plutôt récent, et vous êtes de grands fans
de Dissection (ce qui s'entend un peu effectivement). Pouvez vous nous relater
la naissance de votre groupe, et les influences qui ont présidé à cette
naissance ?
Je ne peux pas nier mon
adoration pour Dissection effectivement. Même s’il n’y avait pas forcément
d’intention musicale définie dans cette direction, j’imagine que l’influence de
Nodveit doit m’affecter inconsciemment. Je dirais que c’est plus un esprit « Darkthronien »
qui nous a influencé dans la genèse, le concept de duo, et l’approche
rock’n’roll, crue et minimaliste. Même si musicalement d’autres choses sont
ressorties, à mon avis à cause de (ou grâce à ?) nos parcours musicaux
respectifs qui ne sont pas exclusivement black metal.
La naissance du groupe c’était plus un coup de tête, une impro d’un soir entre deux musiciens qui avait envie de se défouler et jouer du black métal. On ne pensait même pas en faire un projet sérieux, puis finalement après trois ou quatre répètes on avait des squelettes de morceaux avec des bons riffs. C’est surtout grâce à Vitrid de Issfenn, qui nous a aidé avec l’enregistrement et le mixage, que le groupe s’est concrétisé en vue d’une possible sortie.
Vous avez sorti une tape absolument jouissive que je vous remercie de m'avoir envoyé ! J'y entends certes du black/death mélodique mais aussi de fortes influences black old school avec du Celtic Frost et du Samael dedans... vous confirmez ?
Black old school
définitivement, je pense que l’approche « à la » Darkthrone était une
inspiration comme je le mentionnait, surtout dans l’esprit et la vision. Tout
est question de perception, surtout quand on vient aux comparaisons. Je
n’écoute pas tellement les groupes que tu as cités, même si je comprends les comparaisons,
en réécoutant Morbid Tales par
exemple. J’irai plus vers Venom pour la touche rock’n’roll/heavy ou Bathory
pour le côté mélodique et épique, mais ça reste personnel. J’imagine que black/death
melodique réfère à Dissection, même si je ne pense pas vraiment qu’on écoute du
death mélodique, je n’ai jamais été fan du terme… Je pense que le côté old
school se traduit aussi par des influences thrash, dans l’esprit d’Aura Noir
par exemple, ou cette vibe un peu punk et « D-Beat » qu’on peut
trouver par exemple dans des vieux Carpathian Forest ou Impaled Nazarene, ou
même Sodom.
Ce sont vraiment des perceptions subjectives encore une fois, mais c’est très intéressant de voir comment certains éléments musicaux peuvent être interprétés différemment. Une critique en Finlande nous a comparé à du vieux Graveland, groupe que je n’ai jamais particulièrement écouté non plus.
Comment vous êtes vous retrouvés sur le label de Monarque et Sanctuaire, les productions hérétiques ?
Sans vraiment s’attendre
à un retour on a envoyé les morceaux à LPH, et Monarque nous a proposé une
sortie. On ne s’était jamais parlé avant, c’est donc purement par appréciation
de la musique elle-même que s’est fait cette collaboration. Et non pas par
rapport à qui on connaissait ou qui on était, ce qui est tristement rare de nos
jours dans l’industrie musicale. C’était donc un honneur d’avoir le soutien et
l’approbation d’un artiste comme Monarque, qui reste un des meilleurs groupes
de métal noir Québécois.
Pour continuer avec du “name dropping”, vous
avez aussi été mixés par Joel Grind de Toxic Holocaust, rien que ça ! Comment
s'est faite la rencontre avec ce dernier ? Toxic Holocaust était il pour vous
un exemple de son que vous souhaitiez utiliser pour votre musique ?
Masterisé seulement. Le
mixage a été réalisé par Vitrid du groupe montréalais Issfenn, qui a fait un
super boulot aussi en passant. Je suis devenu fan de Toxic Holocaust en tombant
sur Overdose Of Death en 2008,
surtout à cause du son très old-school, à la fois organique mais puissant. Il y
a une touche rock’n’roll mais ça reste massif et dense. Je pense qu’on peut
entendre une touche thrash dans notre EP. Et j’ai réalisé que Joel était
derrière le mastering de plusieurs albums de groupes que j’aime comme Midnight,
Uada ou Power Trip. J’aime son approche en gardant un son relativement
« sale » ou « organique » mais consistant. Je pense qu’il a
un bon équilibre entre conserver une touche old-school et garder une bonne puissance
de sortie…. Je lui ai simplement envoyé un message, sans le connaître
personnellement, il a aimé les morceaux et nous a fait un bon prix, et surtout
un bon mastering, qui a vraiment donné une touche en plus. Je voulais lui
donner la cassette en main-propres sur la prochaine tournée de Toxic, mais on
dirait que ça va devoir attendre…
Pourquoi ce choix de ne sortir qu'une tape limitée a 150 exemplaires, sans Bandcamp ? (NdS : depuis le Bandcamp a été mis en ligne, voir les liens en bas de page)
On partageait avec Les
Productions Hérétiques cette vision un peu élitiste et minimaliste du black
metal. J’ai toujours été fasciné par cette époque que je n’ai pas connue
malheureusement, où il n’y avait pas Internet et on s’échangeait des cassettes
obscures par la Poste. Où il fallait vraiment creuser pour trouver certains
groupes, éplucher des webzines en noir et blancs. Où écouter une œuvre se
faisait en mettant un objet dans un lecteur, et en le laissant jouer du début à
la fin, en appréciant la création artistique à sa juste valeur. On sait bien
que ça ne plaît pas à tout le monde, et que l’album est déjà en téléchargement
illégal sur des forums, mais on s’en fout. Les gens consciencieux qui veulent
vraiment le EP en digital feront l’effort d’acheter la cassette d’abord et de
nous écrire ensuite. C’est plus par principe, et on est pas ici pour se
« vendre » au maximum.
On peut le voir comme un hommage à cette époque et à ces valeurs, beaucoup moins éphémères et légères de sens comme aujourd’hui. Le côté inaccessible finalement, à l’opposé de notre ère où n’importe quel groupe obscur se trouve en deux clics sur Youtube ou ailleurs, noyé dans l’immense masse de groupes sur toutes les plateformes numériques. Certes on ne peut dénier la visibilité que peut nous apporter ce monde digital. Mais tu vois il y a des jours où je me surprends à rêver qu’un truc explose et qu’on se retrouve dans un monde sans Internet, et où il en reviendrait seulement au bouche-à-oreille et l’autorité de quelques labels bien établis et reconnus de sortir des disques et faire tourner de vrais groupes et artistes qui en valent le coup. Je n’y étais pas, mais je pense que quand Destruction ou Kreator ont débarqué pour la première fois à Montréal dans les années 80, ça devait être la folie furieuse. Et sans événement Facebook ou millions de vues sur Youtube. Quand ces groupes viennent aujourd’hui, je dirais pas que les gens s’en foutent, mais tu comprends mon point. L’excitation n’est pas la même.
Quelle est votre vision de la scène actuelle, au Québec comme ailleurs ?
Vaste question. Je pense
qu’au Québec on est chanceux d’avoir une scène underground assez forte,
notamment en black metal. Ce n’est pas partout comme ça. Après comme pour beaucoup
de styles, on dirait que le black metal est noyé dans une masse grouillante de nouveaux
groupes infinis sur Internet. On est saturé d’artistes et d’albums et c’est
dommage car plusieurs valant le détour se retrouvent enterrés par d’autres
parfois plus profiteurs et habiles en numérique dans un sens. Et je me demande
si ça joue dans le fait d’avoir des scènes peut-être moins actives et présentes
« sur le terrain » dans un sens. Encore une fois au Québec je pense
qu’on la chance d’avoir une scène forte, mais j’ai l’impression qu’ailleurs,
dans certaines grandes villes, des scènes se sont affaiblies où on presque
disparu avec des nouvelles générations qui consomment en ligne et ne sortent
plus vraiment, même dans les musiciens.
Je discutais avec le chanteur de Misþyrming quand ils sont passés à Montréal, il disait qu’en gros pour lui, le terme « atmosphérique » dans le black métal c’était une grosse excuse où passait bien des groupes avec peu de consistance, dont des gars seuls chez eux avec un ordinateur et une guitare dont ils effleurent les cordes dans des riffs insipides, avec une boite à rythme réaliste bien éditée derrière, une tonne de reverb. Sans denier le talent de certains, je pense qu’il y a du vrai, pour le côté de nombres de groupes peu signifiants, sans existence scénique charismatique derrière, qui accèdent grâce à Internet à des audiences crédules. Et encore une fois ça ne contribue pas à renforcer des vrais scènes actives. Tu vois, ça revient un peu à ta question par rapport au fait de ne pas avoir mis les chansons en vente digitale sur Bandcamp. Dans un sens c’est une protestation contre ce phénomène et cette vision.
Et pour en revenir à la notion de scènes c’est intéressant de voir qu’actuellement, c’est parfois dans des territoires plus petits et isolés dans un sens, qu’on voit émerger des scènes plus fortes avec une réelle identité. Tu penses au Metal Noir Québécois, mais aussi au black métal Islandais par exemple. Et si on en vient à la scène de France actuellement, sans oublier des œuvres remarquables déjà établies par exemple par Nocturnal Depression ou Blut Aus Nort dans leurs styles propres, je vois une force d’identité et une certaine authenticité dans cette nouvelle vague un peu médiévale, avec Véhémence ou Aorlhac, imprégnée des racines moyenâgeuses du pays. Dans une ère de mondialisation outrancière qui tend à affaiblir les piliers de nos cultures respectives, j’aime penser que ce genre de scènes puissent porter une force identitaire, une résistance contre ces systèmes internationaux dominants nous éloignant de nos racines.
Si vous deviez présenter Les Anges de La Mort a un néophyte ?
Les Anges de la Mort sont
un crachat sur le monde moderne occidental et le poison qu’est l’homme
contemporain pour la Nature, un sombre tableau de notre espèce. Servi par deux
humains qui jouent avec honnêteté et sans ordinateurs, et sans prétention. De
vrais riffs avec juste une Gibson et un Marshall, et un vrai batteur avec une
vraie frappe, sans triggers, compresseurs ou distorsions numériques fades. Une
tentative ratée de true black metal qui a tourné en quelque chose de plus
rock’n’roll et parfois mélodique, loin d’être parfait, mais joué avec
conviction et authenticité, prêchant la mort des grands seigneurs et la gloire
des esprits libres et vivants, conscients.
"Les Anges de la Mort sont un crachat sur le monde moderne occidental et le poison qu’est l’homme contemporain pour la Nature, un sombre tableau de notre espèce"
Les albums qui vous ont le plus marqués,
toutes époques et genres confondus ?
C’est un peu difficile
comme question, c’est impossible pour moi de se cantonner à un album unique
pour certains artistes, et en plus en voyageant dans le temps et dans les
styles. Je vais essayer de cadrer plus ou moins « heavy metal » pour
ne pas rentrer dans les classiques Led Zeppelin, AC/DC, Deep Purple ou
Guns’n’Roses! Rapidement sans trop réfléchir comme ça : Powerslave de Maiden, Right The Lighting de Metallica, Sacrifice de Motörhead, Répression de Trust, Storm of The Light’s Bane ET The
Somberlain de Dissection (tu t’en doutais), A Blaze in the Northem Sky de Darkthrone. Agent
Orange de Sodom,
1184 de Windir, Phoenix Rising de Destroyer
666, Sons of Northem Darkness de
Immortal, Dawn of Victory de
Rhapsody, Abscence of War.. de
Impaled Nazarene, Pariah de Naglfar Sworn To The Dark de Watain, Overdose of Death de Toxic Holocaust, Satanic Royalty de Midnight, Death By Fire de Enforcer, The Satanist de Behemoth, et même si
c’est devenu de la soupe, le premier Ghost, Opus
Eponymous et pour finir par un
trésor de black metal qui me hante toujours : The Knight, Death and the Devil de Holy Death.
Merci LADLM
Merci à toi, et autres
médias qui donnent une voix aux artistes de l’ombre, à l’art cru et
authentique. C’est dans l’underground, tout arts confondus, que survivra
l’esprit pur et non formaté de l’humain, d’où naîtront les voix de la
résistance contre l’abrutissement de notre race, et l’asservissement aux
diverses entités mondiales dominantes.
"In an era of outrageous globalization that tends to weaken the pillars of our respective cultures, I like to think that such scenes can carry an identity force, a resistance against these dominant international systems that take us away from our roots"
"Anges De La Mort are a spit on the modern western world and the poison that contemporary man is for Nature, a dark picture of our species"
Déjà, lorsque le groupe m'a écrit en m'expliquant que leur tape allait sortir chez Les Productions Hérétiques (le label de Monarque et Sanctuaire, rien que ça !) et que la tape allait être mixée par Joel Grind de Toxic Holocaust, je me suis dit qu'il y avait peu de chances de tomber sur des baltringues. Après écoute du premier titre disponible sur Youtube (l'hymne "Anges de La Mort" à reprendre en famille...a condition d'être une famille de démons) il ne me restait plus beaucoup de doutes : ce nouveau duo formé en 2017 à Montréal envoyait du lourd.
Ne niaisons pas comme disent nos camarades Québecois, cette tape est tout simplement une tuerie, un pur massacre de Black Metal old-school jouissif étalé sur quatre titres.
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