Bonjour Amis des ténèbres belges, bienvenue dans la grotte crasseuse du Scribe...excusez-moi je n'ai pas eu le temps de ranger...Oriflamme est une nouvelle formation de “rural black metal” mais Dyable nous est déjà connu pour ses prestations dans d'autres formations...Pouvez-vous nous parler de la formation de ce nouveau cortège maudit...
Arvak : Bonsoir à toi ami des terres de l’Hexagone ! Pas de souci, on ne juge pas le bordel des autres !
Je vais te raconter comment on en est arrivés à monter Oriflamme et à sortir cette première démo. Tout a commencé en l’an de (ténèbres) grâce 2015, époque à laquelle j’avais quelques idées musicales qui vagabondaient dans un recoin de ma tête. L’ébauche d’Oriflamme s’appelait autrefois « Blasphème » et nous jouions ce que l’on aurait pu appeler une sorte de « Thrashened Black metal ». D’ailleurs, il en est ressorti de cette époque le premier titre de la démo, l’Amer monte, qui n’a de Thrash le beat de batterie. Et encore, je dirais plus punk que Thrash metal, mais passons. Nous répétions dans un local à Huy (région de Liège) chez les parents de notre bassiste JV qui fait toujours partie du projet actuellement. Après une année ou deux, et voyant que tout cela ne menait à pas grand-chose de convaincant au vu notamment de visions divergentes, a suivi une période de remaniement de l’effectif du groupe et du style visé. C’est dans cette période de transition que nous est venue l’idée d’appeler la formation « Oriflamme ». J’étais en plein travail de fin d’études sur la traduction et l’adaptation d’un documentaire sur les armes médiévales « Weapons that Made Brtain » de l’anglais vers le français et j’ai été amené à effectuer quelques recherches terminologiques. C’est ainsi que le terme a été proposé sur la table du groupe et il a été validé par tous. L’idée correspondait parfaitement à nos affinités personnelles que sont l’histoire, surtout le Moyen-âge et la culture. Est ensuite arrivé notre cher camarade Dyable qui nous a rejoint après une discussion lors d’un concert d’Arkona (les Polonais) et Batushka à Arlon. J’ignorais totalement qu’il était capable de vociférer dans un micro, ne le connaissant que pour ses activités de guitariste dans Zardens.
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DYABLE
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Au niveau des influences, tout le monde en a, ce qui est normal...chez vous on entend que vous devez bien apprécier Peste Noire, Sale Freux (avec qui Dyable a partagé un split avec son groupe Eole Noir)...Je ne me trompe pas ? D'autres formations fondamentales pour vous ?
Arvak : En termes d’influences musicales, je ne vais pas te cacher que Peste noire en fait partie même si concrètement le rendu d’Oriflamme en est assez éloigné. Cela dit, mes grosses influences sont le Black métal finlandais (Horna, Sargeist, Behexen, Goatmoon, White death, Beherit, ...and Oceans etc) et le Black métal français issu surtout de la scène toulonnaise dont Seigneur Voland. Mais il est aussi bon d’ajouter la scène Québecoise (Forteresse, Brume d’Automne, Neige éternelle, Frozen Shadows, Délétère etc.) et un peu de scène Slave (Kroda, Nokturnal Mortum, Szron, Mgla, Arkona (pl), Burshtyn, Graveland… Bon j’arrête avec les noms sinon on n’est pas sorti de l’auberge…).
Je vois surtout Oriflamme comme un mélange finno-toulonnais à la sauce BM rural français. Mais bon ce n’est que mon interprétation personnelle de ce que nous produisons. Chacun ressent la musique par son vécu, son expérience, et j’estime que c’est ce qu’il y a de plus inhérent à l’écriture/l’écoute musicale. Pour ce qui est « l’appellation d’origine contrôlée » de BM rural, elle nous est venue lors de nos pérégrinations dans les milieux ruraux, qu’il s’agisse des Fagnes en Belgique ou des Montagnes valaisannes (« Souviens-toi de l’Edelweiss » nous cite d’ailleurs Dyable… nos amis helvètes comprendront l’allusion), ou de la forêt de Mormal dans le Nord français où j’habite depuis environ deux ans. Cette appellation ressort également de notre profonde aversion du milieu citadin et de ses mentalités « regressistes » que l’on travestit de « progressisme ». Je vis actuellement dans ce péril urbain que je subis au quotidien. Cela dit, tout n’est pas tout noir ni tout blanc et j’apprécie certains aspects des villes, notamment architecturaux, quand ceux-ci ne sont pas corrompus de modernisme…
« Ses murs se dessinent pareils à une armée
Et ce qui vient d’elle encore de brume et de fumée
Arrive en appels clairs vers les campagnes.
C’est la ville tentaculaire,
La pieuvre ardente et l’ossuaire
Et la carcasse solennelle.
Et les chemins d’ici s’en vont à l’infini
Vers elle. »
Émile Verhaeren, la Ville dans les Campagnes hallucinées
Dyable : Pour ma part, mais ça ne concernera que le plan de l’écriture, je dirais qu’on est forcément influencés par x ou y facteur. Le contraire est impossible vu que le monde qui nous entoure ne fait que nous influencer consciemment ou non.
Mais (et bien que j’apprécie énormément le travail de SF ou de KPN) ce ne sont pas spécialement ces projets-là qui inspirent ma plume. Ni même un groupe en particulier. Ce seront plutôt les réflexions internes que j’ai en avançant dans la vie de tous les jours. Les rencontres, les confrontations, les échanges que je peux avoir avec les autres humains. C’est ça qui va inspirer mes textes. Ça me permet de mettre des mots sur mes maux, de mettre par écrit mes ressentis vis-à-vis des nombreuses déceptions envers le genre humain.
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ARVAK
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“Murmures de L'Ourthe” est votre première démo...Pouvez-vous nous parler de la thématique et de l'Ourthe ?
Dyable : Il y a une raison pour laquelle nous avons utilisé l’Ourthe et pas une autre rivière, mais celle-ci restera interne à Oriflamme. Toutefois pour ma part je suis relativement satisfait que le nom de cette démo suscite de la curiosité, que l’on se mette à chercher ce qu’est l’Ourthe et involontairement à en apprendre davantage sur le plat pays qu’est le nôtre.
C'est ce que j'appelle un démarrage en fanfare ! Pour tout vous dire, compte tenu de mon âge canonique, il devient rare qu'une première démo m'impressionne...pourtant, la vôtre m'a laissé sur le cul, et la tape de chez Maltkross ne cesse de tourner ! Comment avez-vous construit votre identité musicale, et quelle dose de travail cela a-t-il pu représenter ?
Arvak : On va dire que le démarrage a été très laborieux, car il aura fallu le temps de trouver une osmose entre les membres. Comme dit plus haut, le groupe a vécu certains remaniements et j’ai souvent eu l’impression que j’allais raccrocher et arrêter le projet, ne le voyant pas avancer. Je crois que tout le monde connaît ce genre de phases, pour ma part elles n’ont jamais duré très longtemps. Pour moi, à chaque problème, il n’y a que des solutions alors autant agir, avancer, au lieu de se lamenter sur son sort. Je crois que c’est une philosophie de vie dominante dans l’équipe oriflammienne. Plus tard, j’ai fait la connaissance de notre ingénieur son à qui l’on doit les enregistrements et qui potentiellement deviendra le batteur officiel du groupe. Nous officialiserons probablement ce compagnon d’armes au prochain chapitre d’Oriflamme.
Dyable : Merci de ta sincérité et de ton intérêt pour notre art, ce sont des mots qui font plaisirs à lire.
Mais pour être honnête… Je ne sais pas réellement te répondre. Je n’estime pas pour ma part avoir une identité musicale et je n’ai pas cherché à construire quelque chose destiné à entrer dans telle ou telle case ou tel genre musical. J’écris et chante juste avec autant de sincérité que possible sans chercher à ressembler à quelqu’un d’autre.
Mais j’ai conscience qu’une fois qu’on crée quelques choses, qu’une fois qu’on fait naître une œuvre et qu’on la laisse en pâture au monde les gens vont se l’approprier, s’identifier à elle ou non, l’aimer ou la haïr et inévitablement comparer ça aux autres références qu’ils connaissent.
Je dirais donc en définitive que l’identité musicale publique qu’on m’attribuera sera finalement la création des autres et non la mienne.
Il y a du Punk Hardcore dans certaines de vos chevauchées (j'adore le Punk Hardcore !) ça vous parait étrange que je vous dise ça ?
Arvak : Absolument pas. Il faut savoir que j’ai mon petit passé dans le Hardcore old school mais surtout dans le punk des années 1980. Madball a été une grosse claque à l’époque pour moi. Mais j’ai passé plus de temps à écouter les vieux vinyles trouvés dans les archives parentales comme the Exploited, the Stooges, the Sex Pistols, GG Allin. D'ailleurs, j’écoute toujours the Exploited, les vieux titres surtout. Je suis moins fan des dernières sorties virant Punk Hard Core. Je suis également passé pas mal par la case grunge et la scène des 1990 en écoutant Soundgarden, Alice in Chains (que j’ai repris pas mal étant adolescent), les Meat Puppets, Pearl Jam, Sonic Youth, Mudhoney etc. J’ai pas mal appris à jouer de la guitare sur du Led Zeppelin grâce à mon père qui joue dans un cover band du groupe en question justement (c’est d’ailleurs l’un des premiers groupe de cover de Belgique) depuis 1993. Tout cela a très certainement une influence, aussi infime soit-elle, dans ma façon de composer les riffs.
“J'en peux plus de vous, je sature ! Ma chair n'est que mélancolie” voici un extrait de votre morceau “Le dernier loup des fagnes”...L'humanité vous donne envie de vomir ?
Dyable : L’humanité... C’est mon terrain d’écriture de prédilection.
Mais pour répondre à ta question, je dirais “oui” et “non” à la fois.
J’ai l’impression que plus j’avance dans la vie et plus je prends volontairement de la distance par rapport à l’humanité, mais en même temps sans avoir le choix d’en faire partie, car à notre époque vivre totalement en ermite reste quelque chose de très complexe à réaliser.
Je reste donc très contemplatif vis-à-vis du genre humain. J’analyse, m’analyse, m’interroge sur ce qui m’entoure et à chaque fois j’en arrive à un constat et il n’est que peu ragoûtant. L’humain est la médaille et le revers de la médaille. Capable de prouesses mémorables et d’actes de bonté désintéressés mus par de l’altruisme pur, mais en étant capable dans la même journée d’atrocités monstrueuses que même un animal fou ne produirait pas. La médaille et le revers de la médaille... J’ai à travers mes errances eu l’impression que nous sommes constamment en combat contre une dualité interne, un combat entre des valeurs (nées de dogmes monothéistes ou éducationnels... Choisis ton poison...) et des pulsions monstrueuses.
C’est donc à travers ces réflexions que je peux te dire que oui l’humanité me donne envie de vomir, mais qu’en même temps parfois cette dernière parvient à me surprendre sans crier gare.
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Textes de Dyable pour Oriflamme |
D'ailleurs, sur le même thème, ne trouvez pas que le côté “dépressif” prend le dessus sur le côté “guerrier” du Black Metal ?
Dyable : À cela j’aurais envie de dire que cela dépend de quelle branche du BM tu parles. Si on se dirige vers les fervents défenseurs du True BM tel qu’Hats Barn ou Shadows Ground là je ne vois aucune forme de “dépression” dans leur art. Par contre pour le côté “rural”, je ne dirais pas que le terme “dépressif” serait le mieux employé. Peut-être plus vite “mélancolique” ou encore “désespéré” ou même “nostalgique” mais “dépressif” ça non pas à mes yeux.
Arvak : Je pense comme Dyable qu’on devrait plutôt parler de nostalgie en effet. Il nous arrive d’apprécier certains groupes de DSBM. J’ai tendance à comparer Oriflamme à Kalmankantaja pour le côté un peu plus « nostalgique » et j’aime bien alterner entre les morceaux plus pêchus et les morceaux plus calmes. Ce qui je crois apporte un certain équilibre général dans la démo, et nous allons continuer sur cette voie pour les prochaines sorties.
J'imagine que vous devez nous préparer un album ? À quoi peut-on s'attendre ? Sortira-t-il aussi chez Maltkross ?
Arvak : En ce qui concerne le prochain opus du groupe, la confiance que nous avons envers Maltkross nous pousse à poursuivre notre collaboration avec le label. Par conséquent, nous travaillons actuellement sur une démo II qui sortira au format cassette également, histoire de sortir la petite sœur des murmures de l’Ourthe. S’ensuivra sans doute une compilation CD des deux démos. Un split avec un projet français du Sud-ouest est également en cours de préparation, mais je n’en dirai pas plus pour le moment.
Vos albums préférés de tous les temps ?
Dyable: Honnêtement, je n’en ai pas, car cela dépend énormément de l’humeur dans laquelle je suis, mais là actuellement en écrivant ces lignes je suis d’humeur à me plonger dans mes premiers classiques à savoir “Dusk and Her Embrace” de CoF et “Filosofem” de Burzum.
Arvak : Pareil que Dyable, tout dépend de l’humeur du moment et mes goûts évoluent même si je reste sur mes fondamentaux du BM finlandais. Par contre, je devrais citer l’un de mes tout premiers albums qui m’a plongé corps et âme dans le Black métal : « Enthroned Darkness Triumphant » de Dimmu Borgir dernier album avant que le groupe ne parte en clownerie grotesque… Ahah mais ce n’est qu'un avis qui n'engage que moi.
Sinon mon petit plaisir du moment, c’est l’album Alkemia du groupe Finlandais Hämys dont on remarquera aussi un certain côté « punk » dans les rythmiques. Je recommande !
Si Oriflamme devait être une citation, un proverbe ?
Dyable : “Lire n’est pas un but, mais le moyen pour chacun de remplir le cadre que lui tracent ses dons et ses aptitudes.”
Arvak : Juste une externe parce qu’Émile Verhaeren a tout compris : « Homme, tout affronter vaut mieux que tout comprendre. La vie est à monter, et non pas à descendre »
La Belgique n'a jamais produit une grande quantité de groupes de BM malgré une qualité évidente des formations. Où en est la scène actuelle ?
Dyable : Elle en est au même stade que d’habitude à savoir que la Flandre est un terreau bien plus fertile à la naissance de l’art noir, mais quelques étendards commencent à se dresser également en terre wallonne avec des groupes comme Heinous ou encore avec le label Medieval Prophecy Records proposant des productions de bonnes qualités !
Arvak : Je trouve que la scène belge a sa propre culture du Black Métal et qu’elle a réussi à se démarquer par son style. Et le pays a vu naître pas mal de projets originaux et de très grande qualité : Enthroned, Ancient Rites !!!! Ou encore Anguynguerran, Paragon Impure, Huldrefolk, Possession, Wiegedood… La liste reste quand même bien longue pour un si petit pays quand on la connaît.
À vous de finir : remplissez le vide comme vous le souhaitez :
Nous (l’humanité) méritons d’être jugés, mais lorsque ça arrivera ce ne sera pas en tant qu’individus que cela se fera, mais en tant que (sous) merdes et le constat ne sera pas joli du tout et nous paierons tous pour les erreurs de chacun.
Merci Messieurs !
If it is rather rare that a demo is enough to have enough material for an interview the exceptions exist! Proof of this is Oriflamme and their first 5-track demo which has just been released by Maltkross...A real thunderbolt in the Belgian sky! Explanations with the two wolves of the combo, Dyable and Arvak!
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